Globalement
l'explication des sceptiques, sur cette vague comme sur tous les
milliers de cas d'ovnis rapportés depuis 1947, est toujours la même.
A la base peut être une confusion peu banale (avion, hélicoptère, à la rigueur un avion secret
militaire) mais réelle. Par la suite une vague de
désinformation médiatique et le désir de "croire"
du grand public, amplifiant les habituelles méprises
quotidiennes (lune, vénus, avions, etc.), le tout
saupoudré d'une bonne dose d'affabulateurs ou de truqueurs de
photographie, trop heureux de décrocher à moindres frais
quelques heures de célébrité internationale !
Ce qu'il y a d'imparable avec ce raisonnement c'est que 1) on peut l'avancer
tout le temps, 2) il ne nécessite strictement aucune preuve de
la part de ses partisans, la charge de la preuve est
intégralement reportée sur ceux qui n'y
adhéreraient pas d'instinct.
Voyons tout de même un peu plus en détail ce que cela a donné pour la Vague Belge 89-93.
On nous avait déjà fait le même coup
après la vague française de 1954. Sauf qu'au lieu du
F-117A ou plus récemment du TR-3B "Astra", il s'agissait alors
du Coléoptère de l'ingénieur Leduc, dont le premier vol
officiel de l'unique prototype eut lieu le 5 mai 1959 et la
construction fut définitivement abandonnée quelques mois
plus tard après l'accident grave dont fut victime son pilote.
Les medias ont tout d'abord largement répandu l'idée dans
le grand public que l'ovni triangulaire de la vague Belge était
l'avion furtif américain F117-A.
En particulier le magazine scientifique français Science &
Vie qui titrait en couverture dans son N° 873 de juin 1990 "L'OVNI
c'est lui !". Le journaliste Bernard Thouanel publiait page 84 un long dossier censé étayer cette explication.
Hélas cette "explication minute", issue du raisonnement
biaisé des ufosceptiques ne tient pas la route.
Citons pour s'en convaincre une source impartiale (ie : non
inféodée à un quelconque mouvement ufologique),
puisqu'il s'agit de La Rédaction Nationale,responsable
de
la publication officielle des interventions au Parlement belge.
En l'occurence il s'agit de la réponse (document 969700625,
département D 20),
présentée à la mi-mai 1997,
à la question n° 222 de
Monsieur le Député Van Eetvelt en date du 23
décembre 1996 (source = Inforespace décembre
1997) :
(1) Les USA n'ont jamais demandé l'autorisation de faire
des vols expérimentaux au-dessus de la Belgique.
(2) De tels avions n'ont pas l'autorisation de voler dans le
trafic aérien normal sans être équipés de réflecteurs radar.
Ils doivent pouvoir être observés par les radars sinon ils
poseraient un danger potentiel pour le trafic aérien.
(3) Ce type d'avion vole à une vitesse conventionnelle. Pour
voler à de très basses vitesses telles que décrites dans les
témoignages, ils devraient disposer d'un système de propulsion
dirigeable (vectored thrust). Pour autant que nous soyons au
courant, ceci n'est pas le cas. En tout cas, pour rester
immobile ou pour voler à très basse vitesse, il faut
développer une poussée plus grande que le poids de l'avion.
Avec tous les systèmes de propulsion connus actuellement, ceci
est impossible sans génération d'un bruit très important.
(4) L'Ambassade américaine a fait un communiqué de presse pour
confirmer qu'il n'y a pas eu de vols F 117A au-dessus de la
Belgique.
NB : le suffixe "A" (parfois "B") accolé au nom du F117 ne
signifie pas qu'il s'agit d'un prototype (ils sont
généralement identifiés par le préfixe
"Y"), ni qu'il s'agirait d'un appareil mono ou biplace. Il s'agit tout
simplement de variantes du modèle, en l'occurence ici :
Have Blue (XST) : prototype (2 construits)
YF-117A : version de Pré-Production
F-117A : Production version (59 construits)
F-117B : Proposed improvement
F-117N : Proposed naval version
Le LoFlyte
Une rumeur a ensuite
été lancée (par qui ?) prétendant qu'il pouvait
s'agir d'un engin encore plus secret : le LoFlyte. Cette hypothèse farfelue a été rapidement
démontée, notamment par Thierry Wathelet, alors membre
d'UFOCOM. Lire son excellent dossier ici (suivre les liens, plus de 5 pages denses en tout).
Le premier vol d'essai "grandeur nature" de cet avion
se déroulera seulement dans le courant du mois de novembre
96, soit 7 ans après le début de la Vague Belge,
à Dryden. Jusqu'à lors, l'avion était simplement un
modèle réduit de 100 pouces (~2m54) subissant des tests aérodynamiques
dans leur "tunnel à vent".
D'ailleurs dans un document
officiel issu du Ministère de la Défense Belge et
transmis par fax, via la Rédaction Nationale,
en date du 03 juin 1997, il est clairement établi que non
seulement les hypothèses LoFlyte, F117 et ULM sont totalement
écartées par les autorités Belges, mais que
globalement le cas est loin d'être clôs, comme l'avaient
abusivement clamé tous les médias de l'époque
après une certaine déclaration du ministre M. Poncelet.
Mais bien évidemment, autant les messages "anti-OVNI" ont
été abondamment médiatisés, autant ce
document, pourtant nettement plus prudent, est passé
complètement sous silence...
L'Aurora (vue d'artiste)
Le TR3-A "black manta"
Les légendes urbaines
Le Loflyte commençant à faire "long feu", les
spéculations ont alors franchi un degré de plus dans
l'invérifiable pour tomber dans la science-fiction voire le
complot. Certains ont donc avancé que ces mystérieux triangles belges
seraient des prototypes encore plus secrets et encore plus
avancés technologiquement, issus des mythiques "black programs" : Aurora, TR3-A Black Manta,
TR3-B, Hypersoar, dirigeable furtif géant, etc. Antigravitation,
MHD propulsive, ces engins secrets US n'ont semble-t-il rien à
envier aux soucoupes volantes extraterrestres !
Ce qui caractérise toutes ces hypothèses, hormis qu'elles
soient strictement invérifiables, c'est
généralement qu'elles sont émises par des
personnes ne connaissant pas la vague belge, ni souvent l'ufologie en
général, n'ayant jamais enquêté sur le
terrain, et n'ayant même pour la plupart aucune compétence
dans les domaines aéronautiques de pointe.
Un certain Edgar Fouché est connu pour répandre ces théories sur le web,
reprises également par jean-marc Roeder (lire la revue TOP
Secret) et bien d'autres. Mais le web fourmille de forums et sites
amateurs/complotistes détaillant à loisir ces engins
mystérieux.
Notons par exemple, sur le site de Jeff Rense, cette page (en anglais)
de l'ufologue Tim Matthews, du 13/6/1999, citant un autre ufologue,
Eric Morris, du BUFOSC. Ce dernier reprend à son compte les
paroles d'un supposé pilote de la Force Aérienne Belge
(non cité évidemment), affirmant que la vague belge
était un cover-up pour camoufler les vols d'une plateforme
militaire triangulaire secrète, basée dans le sud-ouest
de l'angleterre ! Nul ne s'étonnera dans cet article que Tim
Matthews cite à l'appui de sa thèse une seule source, le
fameux ufo-sceptique flamand Wim Van Utrecht, dont on pourra apprécier sur cette page
toute la "pertinence" du jugement et la rigueur de ses enquêtes !
Nul ne s'étonnera non plus que Tim Matthews (dis)qualifie du
terme "agents du gouvernement" tous ceux qui, comme Nick Pope ou votre
serviteur, rappellent avec bon sens qu'aucune armée au monde ne
dispose encore d'engins volants ayant les caractéristiques et
performances en vol des "vrais" ovnis. Il n'y a pas de complot pour
cacher la vérité sur les ovnis, non, il y a un complot
pour cacher que nos militaires, tout en montrant de coûteux
avions censés représenter le "top" de la technologie,
dispose en réalité d'une panoplie de "soucoupes" et de
"plateformes géantes" à faire palir de jalousie de
commandant Kirk ou Buck Rogers ... bin voyons !
En réalité, même secrets, les programmes d'avions
militaires d'avant-garde américains doivent respecter certaines
contraintes :
de sécurité : rappelons en effet que, s'agissant de prototypes et non d'avions de
série, imaginer que les Américains auraient pu venir
en tester un (à fortiori, vu le coût, plusieurs) au-dessus de la Belgique, qui est un des pays dont la
densité de population est la plus élevée d'Europe
et ce, dès 1989, relève du délire pur et simple !
d'efficacité : l'état de l'art, le "top" de
l'aviation US pour les 15 ans à venir est censé
être le Joint Strike Fighter (code F35), dont on pourra juger sur
le lien ci-joint
(pdf) des "performances". Pourquoi les USA dépenseraient-ils de
manière visible des dizaines de milliards de dollars chaque
année dans des programmes "officiels", pour des appareils ayant
des performances tout juste supérieures à celles de nos
avions actuels, s'ils disposaient déjà en 1990
d'appareils dignes de la science-fiction ? Comme le disait le capitaine
Ruppelt (responsable du projet Blue book) :
"Nous dépensions des milliards de dollars pour fabriquer des
avions atteignants tout juste la vitesse du son, il eut
été stupide de penser que tout cet argent servait
à dissimuler l'existence d'une arme du genre des UFO". Une
remarque vieille de plus de 50 ans mais qui conserve toute sa
pertinence. A moins de tomber dans les thèses complotistes les
plus spéculatives. Avouez que pour des "sceptiques" qui veulent
réfuter les ovnis et l'HET, ce serait un comble non ?
Enfin, last but not least, notons que nous sommes maintenant 16
ans après le début de la vague des triangles belges. Et
qu'aucun des supposés prototypes secrets censés avoir
joué à cache-cache avec la population à cette
époque, n'a été encore dévoilé par
l'armée américaine, comme cela fut le cas avant pour le
F117 et pour tous les avions "secrets". Non seulement ça, mais
les plateformes plus-légères que l'air de transport de
masse, ou les avions capables de furtivité totale et de
performances en vol de type Aurora, sont encore aujourd'hui de simples
"projets" dans les cartons à dessin, quand ce ne sont pas
purement et simplement des spéculations webophiles issues de
l'imagination débordante de chasseurs de mystères
auto-proclamés 'experts es-aréonautique de pointe' !
L'Aurora ou le TR3-A étaient déjà de la
science-fiction en 1990, ils le restent encore aujourd'hui,
jusqu'à preuve du contraire.
La preuve justement parlons-en. C'est à celui qui fait une
affirmation, extraordinaire qui plus est, d'en apporter la preuve
dit-on. Dans ce cas les défenseurs de l'explication "prototype
ultra-secret" doivent apporter deux preuves :
- que des appareils tels que ceux (trop) souvent cités ci-dessus existent bel et bien
- qu'ils sont capables d'expliquer les observations de la vague belge
Je leur souhaite bon courage.
L'avion de télécommunications AWACS
L'astrophysicien Belge P. Magain (encore lui ! Voir l'article sur la photo de
Petit-Rechain) a eu une révélation en 1992 après
avoir observé personnellement dans le ciel les 3 feux de
signalisation d'un AWACS en mission (chose fréquente en
Belgique à cette époque) : les ovnis de la vague Belge, c'était ça. Une
méprise avec un AWACS. Une telle idée géniale ne
mérite pas plus de commentaire ...
Autres
Il a aussi été mention de la possibilité que ces
ovnis étaient en fait des drones d'espionnages. Aurait-on plus
d'informations sur la description des observations pour vérifier
si cela serait compatible avec un engin volant conventionnel ?
Pourrait-on écarter toute confusion possible avec un drône
ou en engin de manufacture terrestre ?
Wim Van Utrecht est un sceptique néerlandais, fondateur de deux groupes ufologiques : SVL
(Groupement d'Etudes des
Apparitions d'Objets Lumineux Inconnus, dont il est le président) et Caelestia (dont il est le rédacteur en
Chef).
Ce "sceptique", comme nous l'avons vu plus haut, continue à
prétendre que l'ovni du 29/11/89 observé par les gendarmes von Montigny et Nicoll était
... Vénus, et que la photo de Petit Rechain
est un grossier
trucage. Pour le reste il se contente d'afficher ses croyances
en niant simplement toute réalité à cette vague,
sans guère d'arguments. Voir les réfutations de ces
"explications" dans les pages consacrées à ces deux cas
particuliers. Parmi ses écrits relatifs à la vague belge : - Cet article sur le site de la SOBEPS - Cet article sur le site sceptique Néerlandais SKEPTER (lire mon commentaire en fin d'article)
Marc Hallet
Marc
Hallet est un ultra-sceptique zététicien, les soucoupes
sont pour lui un mythe. Il est d'autant plus virulent qu'il reconnait
avoir été dans son adolescence un "croyant" très naif ... Depuis il n'en finit plus de se
venger ...
Son site
est édifiant : Il est devenu tellement extrémiste qu'il
fustige même les traditions populaires : il veut supprimer
toutes les fêtes usuelles (Paques, Noel, Halloween,...) au
prétexte qu'elles dérivent de
supersititions ancestrales ?!
Principaux 'arguments' de Marc Hallet :
La communauté scientifique Belge n'a pas approuvé le travail de la SOBEPS
La
poursuite F16 : Meesseen se rétracte dans le vol2 (NDR : "Vague
d'OVNI sur la Belgique, tome 2") et admet que ça peut être
un artefact
météorologique. Or il s'agit de la seule "preuve
physique" à part la photo de Petit Rechain
Dénigrement du Pr Meesseen qui se serait laissé piéger par un "son d'ovni" factice
Débunk de la photo de Petit-Rechain
Les témoignages de "lumières en triangle" ne valent rien sans photo/vidéo car rien ne prouve
que ce n'étaient pas simplement des avions ordinaires
Enqueteurs SOBEPS biaisés et mauvais : déclarations de Jean-Luc Vertongen et Genevieve
Van Overmeire (chefs de la SOBEPS démissionnaires) qui parlent de la SOBEPS comme étant une "secte
dévouée à l'hypothèse extraterrestre"
Nombreuses incohérences textuelles détectées dans les deux tomes "Vagues d'ovnis" de la SOBEPS
Discussion :
Voir cette page, qui démonte
point par point l'un des textes les plus significatifs de Marc Hallet
sur la vague belge, et notamment tous les 'arguments' ci-dessus.
le site de Tim Printy (en anglais, un long article qui a le mérite de détailler la position des sceptiques)
le texte de Marc Lafleur,
des Sceptiques du Québec, qui visiblement critique sans rien connaitre de la
vague belge, sans avoir
aucunement enqueté. Il continue même de soutenir la thèse du
F117, réfutée depuis unanimement (lire "deuxième
preuve" vers 30% du texte).
Werner
Walter (UFOs, Die Wahrheit, 1996) prone lui
aussi (comme Wim Van Utrecht) la thèse des ultra légers
motorisés (ULM) sans la moindre enquête sur place et sans
tenir compte de ce qui a été observé
réellement.
Paul Vanbrabant
Thierry
Veyt (ancien membre de la SOBEPS, exclu de l'association, et qui a
intenté un procès ensuite (perdu) à la SOBEPS)
De l'attitude des "sceptiques"
Pour en revenir aux ufosceptiques néerlandophones, il est
également très regrettable que cette équipe ait
attendu près de 10 ans pour faire entendre sa voix et affirmer
sa différence alors qu'il lui aurait été possible
dès les premiers jours de la vague de se joindre aux
équipes d'enquêteurs, étonnement peu nombreux,
qui ne
savaient littéralement plus où donner de la tête et
des jambes alors qu'ils sillonnaient la région pour effectuer
leur travail de fourmi. Compte tenu de la quantité de
matière, ils auraient même plutôt été
les bienvenus ! Ce fut par exemple le cas du NUFOC qui a fort
obligeamment transmis à la SOBEPS des copies de plusieurs de ses
enquêtes.
Enfin, comment ne pas soupçonner dans cette tardive autant
qu'inattendue démarche de la part de ces ufologues
néerlandophones ce que dans son livre référence F.
Parmentier qualifie de "ciblage" :
"le ciblage : [consiste à] choisir un cas dont un ou plusieurs
détails peuvent être attaqués afin de fragiliser la
cohérence d'ensemble et, en corollaire, se taire sur les cas
n'offrant pas de prise" (PAR2004, p 275)
car c'est exactement ce dont il s'agit ici. Pour toutes ces raisons, l' "invention" comme dirait P. Lagrange,
tardive et "de circonstance" de cette explication ne peut donc
qu'être rejetée.
Bibliographie :
INF95 : Article du Pr Meessen dans Inforespace, revue de la SOBEPS, n°95 d'octobre 1997. Et sa version Internet :
"Etude de 2 observations du 29/11/1989" ( http://meessen.free.fr/AMeessen/Gileppe/)
VOB1 et 2 : Vague d'Ovni sur la Belgique, Tome 1 et Tome 2.
PAR2004 : François Parmentier, "OVNI : 60 ans de désinformation" éd. du Rocher.