Lac Chauvet, 1952

Les cas solides :

Lac Chauvet, France, 1952

III - Analyse détaillée des photos


L'analyse détaillée des photos du Lac Chauvet

Livre_Guerin Le document ci-dessous est paru en annexe du dernier livre de Pierre Guérin (OVNI Les mécanismes d'une désinformation, Albin Michel, 2000). Il s'agit à peu de choses près de la version française de l'article publié en 1994 dans le Journal Of Scientific Exploration, Vol8, N°4.

Le récit du témoin et les Photos
En cette fin de journée ensoleillée du 18 juillet 1952, à 18 h 10 (temps légal), M. André Frégnale se promenait à proximité du lac Chauvet, un petit lac d'origine volcanique dans la plaine située au pied de la face sud de la chaîne du Sancy. Un vent léger soufflait, venant du nord-ouest à 3 000 m d'altitude, et de l'ouest au sol (vitesse: 60 km/h). Le soleil était encore loin d'être couché (altitude 22°, azimut 97° ouest). Regardant vers le sud, le témoin vit apparaître dans le ciel, venant de sa droite (c'est-à-dire de l'ouest) et se dirigeant vers sa gauche (donc vers l'est) l'objet discoidal dont nous avons fourni la description au chapitre 2. Il commença de le photographier presque aussitôt, alors que l'objet passait plein sud devant lui dans une trajectoire horizontale, atteignant à ce moment sa plus grande hauteur angulaire (photos 1 et 2). Il le photographia ensuite à deux autres reprises, alors que le disque, qui maintenait sa trajectoire horizontale, s'abaissait à gauche vers l'horizon avec la distance par un effet de perspective (photos 3 et 4). Comme la dimension angulaire de l'objet devenait trop petite pour qu'on puisse le photographier utilement, le témoin prit alors ses jumelles pour l'observer. Et ainsi que nous l'avons déjà dit, il le vit quelque temps après disparaître comme s'il s'évanouissait sur place, ce qui peut tenir au fait qu'il le perdit de vue en raison de l'éloignement. L'observation avait duré en tout une cinquantaine de secondes, et Frégnale estima que l'azimut de l'objet avait varié durant ce temps d'une centaine de degrés. La trajectoire était « horizontale et rectiligne », la vitesse linéaire « uniforme », la régularité d'allure « impressionnante » sans aucun balancement sensible à l'œil ni sinuosité de la trajectoire, le silence « total ». L'objet apparaissait comme un disque vu du dessous et incliné par rapport à l'observateur, d'où son apparence elliptique. Il était «dénué de toute saillie, aucune antenne ni hublot ni hélice, aucune trace de fumée ni de gaz chauds ». Sa face visible (inférieure) était sombre, «d'une couleur indéfinissable, gris métallique ou gris-vert ». La bande excentrée plus sombre que nous avons déjà décrite était bien visible à l'œil sous le disque, elle évoqua pour le témoin (dans l'hypothèse qu'il s'agissait d'un engin piloté) une « carlingue » très peu renflée. Le témoin vit aux jumelles une «fente » à l'avant de cette « carlingue » et une autre à l'arrière.
Selon Frégnale, 25 secondes furent consacrées aux prises de vue photographiques, avec un intervalle d'environ 8 secondes entre chaque image. (il est à supposer que cet intervalle dut être plus court entre les deux premières vues qu'entre les deux dernières, la vitesse angulaire de l'objet diminuant avec la distance dans l'hypothèse d'une vitesse linéaire constante.) Les photos furent prises sur du film 35 mm Panatomic X Kodak (une ancienne émulsion noir et blanc peu sensible à grain fin), et le film développé dans un révélateur Kodak à grain fin de type D 25 modifié (au génol, sulfite et acide borique). Le bain était usagé et le développement fut prolongé en conséquence. L'appareil photo 24 x 36 utilisé était un Zeiss Ikon équipé d'un excellent objectif Tessar de focale 45 mm et d'un obturateur Compur (ou Prontor ?). Un filtre jaune Wratten 15 était fixé devant l'objectif pour foncer le ciel bleu. Le diaphragme utilisé était de 1 : 5,6 selon le témoin, et les temps de pose affichés sur l'obturateur de 1 : 250 s (soit approximativement 1 : 200 s réel, les obturateurs centraux étant toujours trop « lents» aux vitesses rapides d'obturation). Le diaphragme (ou la vitesse?) fut augmenté d'un cran après la première vue, si l'on en juge par la densité photographique moyenne des images négatives qui est légèrement diminuée à partir de la seconde vue.
Les quatre vues 24 x 36 portent, en marge du film, les numéros 3-3a, 4-4a, 5-5a et 6-6a. Pour simplifier, nous les désignerons par 1, 2, 3 et 4. Les vues 1 et 2 (qui montrent sur leur droite les branches d'un arbre et son feuillage) ont été prises l'appareil levé vers le ciel et tenu « horizontalement» ; les vues 3 et 4 (qui montrent respectivement des nuages vers l'horizon et un talus herbeux au premier plan), l'appareil tenu « verticalement ».
Sur chacune des images de la soucoupe, la bande sombre allongée sous l'objet est bien visible, mais elle n'évoque aucunement une carlingue, même aplatie. On ne distingue pas non plus de fentes à l'avant et à l'arrière de cette tache. On observe parfaitement le liseré lumineux qui borde la partie supérieure droite de l'ellipse et qui, compte tenu de la position du Soleil, résulte clairement de la réflexion des rayons solaires par la tranche de l'objet et (sur la photo 4) par son dessus.
On remarquera d'autre part que sur la vue 2 et surtout sur la vue 1, l'objet présente un flou de bougé important: les extrémités du grand axe de l'ovale de la soucoupe sont étirées, comme sous l'effet du mouvement de droite à gauche de l'objet dans l'hypothèse d'un temps de pose trop long. En réalité, il s'agit d'un flou de bougé de l'opérateur, et non de l'objet: selon Frégnale, le disque se déplaçait plutôt lentement, et le temps de pose utilisé aurait dû l'immobiliser sur le film. En outre, on constate que l'étirement de l'image n'est pas vraiment parallèle au grand axe de l'ellipse sur la vue 2. Enfin et surtout, on observe le même étirement de l'image sur les détails de l'arbre à la droite du champ photographié. Apparemment, le photographe voulut trop bien faire en essayant de « suivre » l'objet dans sa course lorsqu'il déclencha l'obturateur, mais il le fit d'une façon trop rapide qui créa le flou de bougé observé. Le résultat de cette maladresse, c'est que la longueur du grand axe de l'ellipse est difficile à mesurer avec une grande précision sur la vue 2, et quasiment impossible sur la vue 1.
Un autre point important concerne la ligne d'horizon qui n'est visible sur aucune des images. Nous montrerons plus loin comment il est possible d'en fixer la position par rapport à l'objet, mais il faut au préalable, pour cela, connaître au moins pour chaque image l'orientation de cette ligne par rapport à celle des côtés du rectangle 24 x 36. Il existe une photo sur laquelle cette orientation est mesurable avec une bonne précision, de l'ordre de 0,5° : c'est la photo 3 où l'on voit dans sa partie inférieure des cumulus dont la base est stratifiée par la perspective en lignes parallèles dont tout météorologue sait qu'elles sont horizontales dans le paysage (l'horizon n'est guère plus bas). L'angle que font ces lignes avec le petit côté du rectangle 24 x 36 est de 3°. Ce chiffre n'a rien d'étonnant, la plupart des photographes amateurs travaillant à main levée ne savent pas tenir leur appareil « droit », surtout en l'absence de visée reflex.
Sur la vue 4, l'horizon est apparemment caché par le talus herbeux du premier plan, dont la crête penche d'un angle d'environ 5° sur le petit côté du rectangle de l'image. Cette inclinaison est du même sens que sur la vue 3 et doit traduire une tendance systématique du photographe à pencher son appareil toujours de la même façon. Mais il est évidemment hasardeux d'adopter ici cette valeur de 5° plutôt qu'une valeur voisine, la crête du talus n'ayant pas de raison d'être parfaitement horizontale. Cependant, la valeur de 5° est en bon accord avec l'angle dont il faudrait tourner l'image pour que les brins d'herbe du talus soient en moyenne verticaux. Faute de mieux, nous nous en tiendrons à cette valeur, quitte à la modifier ultérieurement au cas où elle conduirait à des incompatibilités manifestes.
Sur les vues 1 et 2, en revanche, il est impossible de déterminer l'horizontalité sans faire d'hypothèse, mais on a cependant une méthode pour lever l'ambiguïté. Tout d'abord, il semble que le photographe soit resté presque exactement à la même place pour prendre les deux photos, si l'on en juge par les détails des branches et du feuillage de l'arbre à droite qui paraissent pratiquement superposables (un tel critère est extrêmement sensible). En revanche, il est clair que là encore, le photographe n'a pas su tenir son appareil droit (ou plus précisément horizontal), car même si l'on tient compte de la convergence des verticales vers le haut lorsqu'on vise le ciel avec un appareil photo, il est patent que l'arbre n'est pas du tout penché de la même façon sur les deux images. Mais il est connu que la photographie conserve les lignes droites (absence de distorsion géométrique), du moins avec les objectifs standard à focale fixe comme le Tessar. (Les zooms modernes à grande variation d'amplitude sont toujours affectés de distorsion géométrique en tonneau à la courte focale et de distorsion en coussinet à la longue focale.) Si l'on prolonge l'axe de la bande sombre sous le disque jusqu'à l'arbre sur chacune des deux photos, on constate que les deux lignes tombent au même point de l'arbre et se trouvent pratiquement confondues. Elles représentent apparemment une portion de la trajectoire de l'objet qui s'effectue en cette région du ciel suivant l'axe de la bande. Or, selon le témoin, l'objet passait alors plein sud perpendiculairement à la ligne de visée en décrivant une trajectoire horizontale rectiligne. La portion de trajectoire apparente que nous venons de définir peut donc être considérée, si nous prenons au mot le photographe, comme approximativement parallèle à l'horizon sud. Comme on le voit, nous construisons notre modèle de trajectoire à partir des déclarations du témoin, nous réservant de le mettre en contradiction avec lui-même si le modèle conduit à des incohérences et se voit infirmé par les mesures faites sur les clichés.
Mesures physiques et géométriques sur les images de l'objet
Netteté des contours et distance minimale de l'objet.
Sur les vues 3 et 4, la soucoupe est d'une netteté excellente, elle se découpe comme au couteau sur le ciel, et l'étalement des bords de son image (visible seulement sur de forts agrandissements) peut être estimé à 1/100 de mm, ce qui correspond sensiblement à la limite de résolution du film Panatomic-X pour des détails contrastés. La mise au point sur l'objet était donc parfaite, et comme les contours des nuages visibles dans le bas de la vue 3 sont également nets, on peut en inférer que l'appareil était réglé sur l'infini. Un test indépendant nous le confinne : sur la vue 4, les détails de la branche d'arbre au second plan, qui « pointe» vers la soucoupe, sont sensiblement moins nets que celle-ci; et quant aux herbes du talus au premier plan, elles sont franchement « adoucies» par un défaut manifeste de mise au point. On peut croire Frégnale lorsqu'il nous dit que le diaphragme d'objectif utilisé était de 1 : 5,6. Car, pour une focale aussi petite que 45 mm, si le diaphragme avait été nettement plus fenné, tous les détails du paysage eussent été nets.
Ce fait nous pennet d'estimer, par un calcul élémentaire de profondeur de champ, la distance minimale de l'objet en deçà de laquelle on commencerait à percevoir une altération de la netteté de son contour. On trouve une distance d'une soixantaine de mètres. Comme l'objet sous-tend en moyenne sur le ciel un angle de l'ordre de 1°, ainsi que nous le verrons plus loin, ceci impliquerait, dans le cas d'une maquette suspendue, un disque d'au moins un mètre de diamètre pendu au bout d'un fil (invisible) accroché à une grue d'au moins 50 m de hauteur (de façon que son bras reste en dehors du champ des photos). Je laisse au lecteur le soin de juger du réalisme d'une telle hypothèse. Mais, en fait, l'objet devait être bien plus éloigné encore que cette distance minimale, si l'on en juge par son contraste sur le ciel, qui est plus faible sur la vue 4 que sur la vue 2 - indice de l'interposition d'un léger voile atmosphérique sur la dernière vue. Or il faisait un beau temps sec, et pour qu'un tel voile soit sensible, la distance devait être au moins de l'ordre du kilomètre plutôt que d'une centaine de mètres. L'hypothèse de la maquette se trouve ainsi définitivement exclue.

Paramètres géométriques de l'objet sur les quatre clichés. Sur les quatre images, le disque est vu sous la forme d'une ellipse plus ou moins aplatie dont on peut mesurer (fig. 1) le grand axe 2a et le petit axe 2b. (L'ellipsité, ou aplatissement, est le rapport b/a.) Sur les images 2 et 3, qui sont très nettes, on peut également mesurer l'angle u que fait la bande sombre excentrée avec le grand axe, et l'angle v que fait le petit côté du rectangle de l'image 24 x 36 avec le grand axe. Si l'on connaît l'inclinaison w de l'horizon sur ce petit côté du rectangle, on en déduit l'angle w du grand axe, ainsi que l'angle g de la bande excentrée, avec l'horizon:
w = v + W
g = u - w

Lac Chauvet, Figure 1
Nous aurons besoin de w et de g pour calculer la hauteur angulaire a de l'objet au-dessus de l'horizon, comme nous le montrerons plus loin.
Sur la photo 2, on constate que l'angle u n'est pas nul, bien que petit. On peut estimer sa valeur à 4° environ, mais il est impossible de faire la part de w et de g dans cette inclinaison de la bande excentrée sur le grand axe. La caméra vise approximativement le sud et non pas l'objet, la trajectoire apparente est horizontale comme on l'a dit plus haut, mais elle cesserait de l'être et elle commencerait de s'incliner très légèrement vers le bas à gauche (comme sur les photos suivantes) si la caméra avait été tournée vers l'est de façon à amener l'objet exactement au centre du champ, ce qui aurait permis de mesurer cette inclinaison apparente. Mais cela n'est pas possible ici.
Des remarques analogues peuvent être faites à propos de la photo 1 sur laquelle le flou de bougé est tel que les deux extrémités du grand axe de l'ellipse sont « rognées» sur les tirages clairs. Mais si l'on fait les mesures sur un tirage sombre largement posé, qui montre l'étalement dû au flou dans toute son extension (y compris le liseré brillant à droite qui est énormément élargi), on peut définir assez bien l'angle u, sa valeur étant comprise entre -13° et -17° environ.
En ce qui concerne maintenant les mesures des grands axes et des petits axes, elles peuvent être faites avec une bonne précision sur les images 3 et 4, mais il faut tenir compte empiriquement de la légère déformation de l'ellipse par le liseré brillant qui la borde en haut à droite et dont la lumière empiète sur son contour par effet de diffusion photographique. En revanche, le flou de bougé sur les photos 1 et 2 rend la mesure du grand axe difficile sur la photo 2 et aléatoire sur la photo 1. En dépit de ces incertitudes, le grand axe sur la photo 1 semble clairement plus petit que sur la photo 2 (cela apparaît sur les tirages, sombres ou clairs). Le passage de l'objet à la plus petite distance de l'observateur se situerait donc entre les positions 1 et 2, et plus près de la position 1 que de la position 2. En revanche, le petit axe, correctement mesurable sur les deux images, est très légèrement plus grand en 1 qu'en 2, ce qui pourrait signifier simplement que l'ellipse est plus «ouverte» ou autrement dit que le disque est incliné d'un angle plus grand vers le témoin.
Les mesures brutes des axes de l'ellipse (faites sur des agrandissements tous à la même échelle) ont ensuite été corrigées de la déformation géométrique inhérente à la projection, à travers un objectif, de l'image d'un objet photographié sur un plan (celui du film). Si d est la distance angulaire de l'objet au centre du champ photographié, l'image est étirée transversalement par le facteur 1/cosd et radialement par le facteur 1/cos2d. Cet effet est surtout sensible avec les objectifs grand-angulaires. Dans le cas présent, d est seulement de l'ordre de 10° et la déformation est faible, mais elle n'est cependant pas négligeable.
Pour ce qui est maintenant des inclinaisons de l'ellipse et de la bande excentrée, elles sont plus difficiles à mesurer avec précision, en particulier l'angle u sur la photo 4 (en raison de la faible longueur de la bande sur cette image) et plus encore sur la photo 2 (en raison du flou de bougé). Les cor- rections des données brutes sont ici inutiles, compte tenu de l'imprécision des mesures.
Les valeurs obtenues finalement sont données dans le tableau ci-dessous. Les longueurs 2a et 2b ont été ramenées par le calcul à leur valeur sur les négatifs originaux (ce qui foumit plus de décimales que les mesures n'en donnent réellement). Elles sont foumies en millimètres. Les angles sont exprimés en degrés. Les marges d'erreur indiquées correspondent aux erreurs maximales sur les mesures.
Chauvet, Tableau 1
La modélisation
Elle est fondée sur les allégations du témoin: un disque volant décrivant, à vitesse régulière, d'ouest en est, une trajectoire horizontale le faisant s'abaisser à l'est sur l'horizon par un effet de perspective à mesure qu'il s'éloigne. Ce disque est vu sous la forme d'une ellipse. L'examen des photographies révèle que cette ellipse s'incline par rapport à la ligne d'horizon d'un angle w qui croît à mesure que l'objet s'éloigne.
Ce fait peut s'interpréter simplement de la façon suivante, qui est suggérée par l'absence alléguée de tout balancement de l'objet: le plan de la face inférieure du disque (celle qui est visible) est incliné sur le plan horizontal en direction du nord, d'un angle W autour d'un axe confondu avec la trajectoire. Lorsque le disque passe plein sud à sa plus petite distance du témoin, sa face inférieure est tournée vers ce dernier de l'angle W, l'ellipse apparaît plus « ouverte » que si le disque volait « à plat », mais le témoin n'a aucun moyen de s'en apercevoir, car elle ne penche ni à droite ni à gauche. Puis, à mesure que le disque s'éloigne vers l'est (photos 2 et surtout 3 et 4), sa face inférieure qui reste toujours tournée de l'angle W vers le nord (c'est-à-dire maintenant vers la gauche pour l'observateur) apparaît de plus en plus fortement inclinée sur l'horizontale, l'inclinaison apparente w restant de toute façon inférieure à W (sauf si le disque était vu à l'infini par sa tranche).
La bande excentrée se trouve, comme on l'a vu, dans l'alignement de la trajectoire sur les photos 1 et 2, et l'on admettra qu'elle s'y maintient sur les photos 3 et 4, ce qui est suggéré par le fait qu'elle s'incline à droite vers le haut à mesure que l'objet s'incline à gauche vers le bas. L'axe de cette bande, qui fait un angle g avec l'horizontale sur les photos, fournit donc, dans cette hypothèse, la direction de la trajectoire apparente sur chaque image.
Tel est le modèle simple, établi à partir des dires du témoin, que nous allons tenter de tester numériquement pour voir s'il est en accord avec les données tirées des mesures faites sur les clichés. Pour ce faire, nous devons mettre lé modèle sous la forme d'équations mathématiques.

I. Les équations traduisant le fait que la trajectoire de l'objet est horizontale

1. Relation entre la hauteur angulaire et le diamètre appa- rent de l'objet. On a (fig. 2) :

Or, le rapport OSi / OS des distances de l'objet au témoin est égal au rapport inverse aj / ai des dimensions apparentes du grand axe de l'objet (lequel sous-tend de petits angles, de l'ordre de 1°). On a donc:

Lac Chauvet, Figure 2
2. Formule donnant l'azimut et la hauteur angulaire de l'objet en fonction de sa hauteur angulaire maximale à sa distance la plus proche. L'azimut b est mesuré à partir de la direction Oso (fig. 3). On a :

3. Formule donnant l'inclinaison g de la trajectoire apparente sur l'horizon en fonction de la hauteur et de l'azimut. En tout point S de la trajectoire horizontale réelle (fig. 3), un déplacement infinitésimal SS' = dL de l'objet est vu par l'observateur situé en 0 comme un déplacement apparent ST = dl pouvant être décomposé en un déplacement horizontal dx et un déplacement vertical dy. (Pour des raisons de commodité du dessin, la figure a été établie en supposant que l'objet remonte sa trajectoire vers la droite en s'approchant de l'obseIVateur, cela ne change rien au raisonnement.) L'inclinaison g de la trajectoire apparente sur l'horizontale est donnée dans tous les cas par la relation:

Lac Chauvet, Figure 3
Différencions cette dernière expression, nous obtenons:

II. Les équations faisant intervenir l'inclinaison du disque sur l'horizontale

1. Hauteur angulaire du disque en fonction de a, b, w et g.
Si le disque volait « à plat» (W = 0), le rapport b'/a des axes de l'ellipse telle qu'elle apparaîtrait à l'observateur serait le cosinus de l'angle f du plan du disque avec le plan perpendiculaire à la ligne de visée. Le complément de cet angle fournirait la hauteur angulaire a de l'objet. Mais le disque ne vole pas « à plat» et nous ne connaissons pas l'angle W qu'il fait avec l'horizontale. Nous pouvons cependant calculer b'/a à partir du rapport b/a réellement observé, de la façon suivante:
Puisque le disque est incliné autour de l'axe AB (fig. 3), l'image « redressée » que l'on verrait s'il volait « à plat » passe également par A et B. Dans le système d'axes Oxy, le point A est sur la droite OA, d'équation y = tan (w + g). x. Il est également sur l'ellipse réellement observée, d'équation (x / a)2 + (y / b)2 = 1. Les coordonnées XA, YA du point A sont donc données par:

Dans le système d'axes redressés OXY, les coordonnées du point A sont:

Mais A appartient également à l'ellipse redressée, dont l'équation est (X / a)2 + (Y / b')2 = 1, puisque a est inchangé. On en déduit :

D'où la hauteur du disque au-dessus de l'horizon: a = Arc sin (b' / a). On peut programmer facilement cette suite de calculs : on rentre a, b, w et g dans la machine, celle-ci calcule d'abord xA et yA, puis XA et YA, enfin b' / a, puis a. Mais on peut calculer directement l'angle a par sa tangente, en posant r = b / a (aplatissement de l'ellipse observée). On trouve alors, à partir des équations précédentes:

2. Formule donnant l'inclinaison W du plan du disque sur le plan horizontal en fonction de w et de b.
Une suite de manipulations algébriques portant sur les équations précédentes fournit la relation :

Le test du modèle

I. Hauteur angulaire du disque sur les quatre photos


Les photos 3 et 4 sont les plus nettes et w et g peuvent être mesurés sur chacune d'elles, ainsi que a et b, avec une bonne précision. En reportant dans (4) les valeurs de ces paramètres fournies dans le tableau, nous obtenons :

(Les marges d'erreur indiquées sont une estimation de l'écart-type ou standard deviation.)
Ces résultats sont compatibles avec la position présumée de l'horizon sur les photos 3 et 4. Un premier test est possible, permettant de vérifier si la trajectoire est bien horizontale entre les positions 3 et 4. A partir de l'équation (1), nous pouvons calculer alpha4 à partir de alpha3 (qui est la hauteur angulaire mesurée avec la plus grande précision relative). On trouve:

L'accord est excellent, la trajectoire se maintient donc bien horizontale entre les positions 3 et 4. Ceci nous encourage à calculer alpha2 par la formule (1). On trouve :
Nous pouvons vérifier si cette valeur de alpha2 calculée en supposant la trajectoire horizontale entre les positions 2 et 3, est compatible avec la valeur de l'angle u sur l'image 2, estimée à 4° environ. On a u = w + g, et comme w est toujours plus petit que g, on fera à titre d'essai l'hypothèse w2 = 1°, g2 = 3°. Calculons a2 à partir de ces valeurs, on trouve:

La concordance (trop) excellente ne doit pas tromper. Nous ignorons en fait les vraies valeurs de w2 et g2 et l'écart-type est d'au-moins 3° sur a2. On peut seulement dire que l'estimation de la valeur de u faite sur l'image 2 est compatible avec l'horizontalité de la trajectoire entre les positions 2 et 3.
Il reste à déterminer l'angle a1. On peut le déduire de la formule(l) comme on l'a fait pour a2 et l'on trouve ainsi:

Cette valeur est compatible avec l'estimation faite de u1 si l'on prend w1 = 6° et g1 = 10°, auquel cas le calcul qui ramène le disque «à plat» donne:


II. Valeurs de l'azimut du disque et de l'inclinaison de son plan sur le plan horizontal

Le complément de l'angle a2 calculé plus haut de deux façons indépendantes est f = 42,95°, c'est l'angle que ferait le disque avec le plan normal à la ligne de visée si le disque volait « à plat ». Le rapport r2 = b2 / a2 est 0,82, ce qui correspond à une inclinaison réelle de 34,9°. La différence entre les deux angles fournit une estimation de W2, puisque l'objet en position 2 n'est pas loin de son rapprochement maximum.
On a :
La formule (5) nous donne:


Ce résultat montre que l'objet avait à peine passé le cap de son plus grand rapprochement lorsqu'il arriva en position 2, et l'on comprend dès lors pourquoi l'angle du grand axe de l'ellipse avec la trajectoire (c'est-à-dire l'axe de la bande excentrée) semble inversé sur l'image 1 prise avant ce passage. A titre indicatif, l'arc de trajectoire entre les positions 1 et 2 est mesurable en se repérant sur les détails des branchages, il est de l'ordre de 12°. Ceci correspond à une variation d'azimut au sol de 12° /cos a, a étant la hauteur angulaire moyenne de l'objet (47°). On trouve ainsi une variation d'azimut d'une vingtaine de degrés, ce qui prouve que l'objet en position 1 se trouvait à environ à 16° d'azimut ouest. Nous pouvons maintenant calculer la hauteur angulaire a0 de l'objet à son plus grand rapprochement, ainsi que les azimuts de l'objet dans les positions 1, 3 et 4, en utilisant la formule (2) :

Cette valeur de tan a0 va nous permettre de calculer les azimuts b1, b3 et b4 à partir de a1, a3 et a4 en utilisant la formule (2). On a:

La variation d'azimut est de 66° entre les positions 1 et 4 de l'objet sur les photos, chiffre à rapprocher de la variation totale d'azimut du début à la fin des observations, estimée par Frégnale à une centaine de degrés.
En portant les quatre valeurs successives de b dans la formule (1), nous trouvons:

L'inclinaison W du disque sur le plan horizontal n'est donc pas restée rigoureusement constante tout au long de la trajectoire, variant dans une fourchette de 5 à 12°, ce dont le témoin (qui n'avait noté aucun balancement) n'a pu évidemment s'apercevoir compte tenu de la faible amplitude du phénomène.

III. Inclinaison de la trajectoire apparente du disque sur l'horizontale


Les valeurs de l'azimut b que nous venons d'obtenir vont nous permettre de calculer l'inclinaison g de la trajectoire apparente de l'objet sur l'horizon, tout au moins dans les positions 1, 3 et 4, au moyen de la formule (3). (Dans la position 2, l'inclinaison est pratiquement nulle.) On trouve ainsi respectivement: g1 = 11° (au lieu des 10° retenus plus haut pour l'inclinaison de la tache excentrée en position 1), g3 = 26,9° (au lieu des 26° mesurés) et enfin g4 = 40,1° (au lieu des 41 ° mesurés). Ici encore, l'accord est excellent entre les résultats du calcul tirés du modèle, et les mesures sur les photos. L'alignement de la bande excentrée sur la trajectoire se trouve confirmé, ce qui valide a posteriori la valeur de a0 qui entre par sa tangente trigonométrique dans le calcul des azimuts.
Conclusion
Ces photographies de la soucoupe volante du lac Chauvet ont la particularité rarissime de contenir en elles la preuve de leur authenticité, grâce à la conjonction de plusieurs facteurs :
  1. l'existence de quatre images prises à la suite au cours du déplacement de l'objet
  2. la qualité de l'optique de l'appareil photo, la finesse du grain du film et la présence opportune de détails du paysage au premier et au second plan, grâce auxquels il est possible de rétablir l'orientation de la ligne d'horizon (invisible sur les images) et d'affirmer par ailleurs, grâce à un calcul de profondeur de champ, que le disque photographié est trop éloigné de l'observateur et de trop grande dimension pour être une maquette
  3. la présence, sur la face inférieure du disque, d'une bande sombre allongée dans le sens inverse du déplacement et dont l'axe semble confondu avec celui de la trajectoire (hypothèse retenue à titre d'essai)
  4. l'assertion du témoin selon laquelle le disque, dont la face inférieure était légèrement inclinée vers l' observateur, se déplaçait horizontalement en ligne droite d'ouest en est.
A partir de ces données, un modèle géométrique a été élaboré, dans lequel toutes les mesures faites sur les clichés ont pu s'insérer sans conduire à aucune contradiction interne. Mais le modèle ne s'est pas seulement trouvé en accord avec les mesures, il s'est égaIement révélé prédictif et a permis de calculer les hauteurs angulaires successives du disque, l'angle d'inclinaison de sa face inférieure vers le nord, la variation de son azimut au cours du déplacement, etc. Un tel accord entre le modèle et les mesures ne peut être l'effet du hasard et prouve clairement que le disque a bien volé dans le ciel selon la trajectoire décrite par le témoin. L'hypothèse de l'alignement de la bande excentrée sur l'axe de la trajectoire s'est trouvée confirmée. Cet alignement s'est maintenu pendant toute la durée de l'observation, ce qui achève définitivement d'éliminer toute possibilité de truquage au moyen d'une maquette oscillant au bout d'un filou lancée en l'air.
Il est amusant de constater que Frégnale, qui ne "croyait" pas aux soucoupes volantes, ne croyait pas non plus à la possibilité d'établir que ses photos n'avaient pas été truquées: «Chose impossible à prouver, écrivait-il en 1975, car on peut faire n'importe quoi en photo. » Un tel jugement s'applique incontestablement à la photo numérique, mais non à la photo classique (argentique) lorsque plusieurs facteurs sont réunis comme ici pour éliminer toute possibilité d'une fabrication, à commencer par cette prise de quatre clichés successifs avec des détails du paysage dans le champ, ce dont Frégnale doit être félicité. Mais nous devons remercier aussi - même s'ils ne nous entendent pas -les concepteurs de l'engin de l'avoir doté sur sa face inférieure d'une bande sombre toujours orientée dans le sens du mouvement, et son pilote de lui avoir fait suivre une trajectoire rectiligne facile à analyser, au lieu d'une trajectoire en feuille morte ou en zigzag comme c'est si souvent le cas pour les Ovnis. Une conjonction de circonstances aussi favorables n'est sans doute pas près de se reproduire en France, surtout si les Ovnis continuent de s'y montrer moins souvent qu'autrefois en plein jour. Ne perdons pas de vue toutefois que la situation actuelle peut changer. Les Ovnis ne nous demandent pas notre avis pour décider ou non d'arriver par vagues au-dessus de telle ou telle région du globe.
Mais revenons aux photos du lac Chauvet. Si l'on fait l'hypothèse que le disque visible sur ces photos mesurait une quinzaine de mètres de diamètre, ce qui était une dimension courante pour les soucoupes volantes de l'époque d'après les estimations des témoins, on peut calculer facilement, à partir des données obtenues plus haut:
- la hauteur de sa trajectoire au-dessus du sol (supposé horizontal) : 590 m;
- la plus petite distance de l'objet à l'observateur : 800m;
- la longueur du segment de trajectoire parcouru en 25 s entre la vue 1 et la vue 4 : 1160 m;
- la vitesse moyenne de l'objet: 170 km/h.
D'autre part, si l'objet avait les dimensions que nous venons de dire, et même s'il ne mesurait que 9 ou 10 m de diamètre, sa vitesse excédait significativement les 60 km/h du vent qui soufflait de l'ouest à basse altitude. Il était donc nécessairement autopropulsé, et non pas poussé par le vent comme l'eût été un ballon. Il s'agissait bien d'un engin volant.
Ceux qui refusent de voir la réalité des Ovnis en face n'admettront évidemment jamais que cet engin ait pu être une soucoupe volante de fabrication non terrestre, et ils chercheront n'importe quelle "explication", aussi invraisemblable soit-elle, pour en rendre compte. Ainsi, contre tout bon sens, Frégnale lui-même continuait de proposer en 1975 son hypothèse d'un "phénomène cosmique inconnu", à moins qu'il ne s'agisse d'une " maquette volante pour s'amuser aux dépens des badauds" (sic). Et beaucoup plus récemment, un astrophysicien professeur au Collège de France, à qui j'avais soumis en 1993 mon travail d'analyse des photos du lac Chauvet, m'écrivait avec la courtoisie dont il ne se départit jamais qu'il appréciait la rigueur de ce travail, et ajoutait: « Un seul fait avéré suffit à compenser l'effet pervers de mille malversations. Il reste que l'objet en question est non identifié, et que la probabilité d'identification la plus grande pointe vers l'objet de fabrication humaine: engin militaire ou civil expérimental, donc protégé contre une dissémination de l'information (brevets, etc.). Et la plus petite probabilité, vers l'objet extraterrestre.» Oui, vous avez bien lu! Non seulement mon correspondant laissait entendre que l'immense majorité des photos d'Ovnis sont des faux, mais il ne craignait pas de suggérer qu'en 1952, quelques années seulement après la fin de la Seconde Guerre mondiale d'où la France était sortie exsangue, notre pays (et l'on pourrait en dire autant des Etats-Unis et de l'URSS à l'époque) aurait été capable de construire et de faire voler silencieusement en altitude et à faible vitesse un disque de plusieurs mètres de diamètre, sans ailes sustentatrices, sans hélice, sans jet de gaz! Un tel engin n'existait alors nulle part dans l'arsenal militaire des grandes puissances et encore moins bien sûr dans celui de notre pays. C'est seulement depuis deux décennies au plus, et en particulier grâce à l'arrivée sur le marché des puces électroniques, que de petits engins militaires de reconnaissance très légers et téléguidés, les drones, ont commencé d'être construits aux États-Unis, puis dans d'autres pays. Il s'agit le plus souvent de petits avions de formes diverses et non totalement silencieux. Cependant, selon certaines informations, d'autres drones (?) de plus grandes dimensions pourraient ressembler à des Ovnis - si ce n'en sont - et utiliseraient un mode de propulsion non classique fondé sur des effets physiques à propos desquels nous avons peu de renseignements, ce qui pose le problème de l'origine d'une telle percée aussi bien théorique que technologique. Cette question est abordée dans le chapitre 3. Quoi qu'il en soit, les drones n'existaient pas en France en 1952, et l'objet photographié par Frégnale au sud du Puy de Sancy - une classique soucoupe volante comme on en décrivait couramment depuis 1947 en de nombreux pays - ne pouvait certainement pas être un engin d'origine terrestre...

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Article créé le : 30/08/2003 ; Dernière révision le 24/12/2003