Lecture critique du livre de Gilles Fernandez "Roswell :
rencontre du premier mythe"
Propos liminaire
Ce texte est une critique du livre "Roswell : Rencontre du premier
mythe" de Gilles Fernandez, paru en avril 2010 aux
éditions BOD.
Il s'agit du premier livre "sceptique" sur le cas si
célèbre de Roswell en 1947. Après l'avoir
découvert sur le forum des Sceptiques du Québec, je me
suis décidé à l'acheter, puis à en
débattre avec son auteur et enfin à mettre en forme ma
position dans un texte publié.
J'avais cependant sous-estimé l'ampleur de la tâche, la
complexité qu'a pris ce cas fondateur avec le temps,
l'infinité des pistes à vérifier, des informations
à recouper, des témoignages à analyser.
Cette critique reste donc partielle, inachevée, insatisfaisante
quant à sa conclusion. Je ne pouvais pas égaler en trois
semaines les 18 mois de travail de son auteur.
Disons le tout de suite ce livre a eu le mérite, non
seulement de renouveler mon intérêt sur ce cas, mais
surtout de modifier grandement ma position quant à sa nature.
Jusqu'à lors j'étais nettement (plus de 80%) en
faveur de l'origine "extraordinaire" de ces débris (autrement
dit le crash
d'un engin extraterrestre). Désormais je suis beaucoup plus
dubitatif, disons que s'il fallait chiffrer ma position aujoud'hui je
donnerai un 51/49 en faveur de la thèse "ordinaire-officielle"
à
savoir un vol MOGUL, probablement le N°4. Et cela en
grande partie grâce à ce livre, qui présente pour
la
première fois une synthèse fouillée en
Français des arguments en faveur de l'explication prosaique, et
en partie aussi grâce aux recherches personnelles que sa lecture
m'a amené à faire.
Pour autant mon curseur de vraisemblance n'a pas encore totalement
basculé de l'autre coté. Si l'hypothèse MOGUL
m'apparait désormais très possible, voire probable, il
reste quand
même des points en suspens, des questions sans réponse,
des incohérences voire des invraisemblances dans cette
hypothèse qui me paraissent loint d'être
négligeables.
C'est pourquoi mon analyse du livre de Gilles Fernandez, tout en
soulignant à chaque fois les points d'accord, passera plus de
temps justement à mettre en lumière et à analyser
les points de désaccord. Puisqu'en effet sur ce cas comme sur
tous les autres, et sauf coup de théâtre
imprévisible, il n'y a pas de preuves tangibles,
matérielles à se mettre sous la dent, seule
l'impossibilité éventuelle de toute explication
"ordinaire" peut rendre crédible l'appel à une cause
"extraordinaire".
NB : dans la suite du texte l'acronyme GF ou le terme "l'auteur"
désignent Gilles Fernandez.
Critique du livre
Quelques critiques mineures de forme pour commencer
La 4ème de couverture dit : "l'ouvrage montre que choisir une
explication [extraordinaire] plutôt qu'une autre [ordinaire]
relève du déni".
Voilà une phrase qui tendrait à présenter
l'ouvrage comme neutre, objectif, équilibré, sans parti
pris. Or il n'en est rien, l'auteur a une approche sceptique (moderne)
et l'entièreté de l'ouvrage va dans une seule direction :
l'explication "ordinaire" par un vol MOGUL. D'ailleurs le titre de
couverture lui est explicite ("le premier mythe"). Alors pourquoi cette
frilosité et même cette contre-vérité en
4ème de couverture ? Je veux croire qu'elle n'a pas
été écrite par l'auteur.
Dès la Table des matières, j'ai eu une
appréhension. Les titres des différents chapitres
relèvent en effet pour la plupart de ce mauvais humour que je
déteste
tant dans trop de publications sceptiques. "Thunderbirds 3&4
décollage !", "Gérald Anderson, les Apaches et
l'inspecteur Colombo", ou "l'infirmière et le croque-mort"
étant à citer comme exemple des plus "inventifs". Pour
mémoire c'est d'ailleurs en réaction à un
article au titre du même tonneau ("Cussac, 30 ans dans un cul de
sac", d'Eric Maillot)
que j'avais commencé mon site web en 2003.
C'est d'autant plus regrettable que le reste du livre lui est bien
écrit et s'astreint à rester globalement sur les
faits, les idées, les raisonnements.
Toujours sur la forme GF abuse des emphases typographiques de type
italique, gras ou souligné. Cela peut être utile dans un
mémo interne destiné à son employeur, ou
à petite dose dans une discussion sur un forum ou un court
article. Mais extensivement, dans un livre de 200 pages, cela devient
génant.
II le sac à dos, et III A propos du témoignage
Il s'agit d'un résumé remarquable de la panoplie
d'analyse
du parfait sceptique moderne. Du rasoir d'Occam à la
fragilité du témoignage humain, la douzaine d'arguments
classiques de la réthorique sceptique y passe. On a même
l'appel à notre chère Elisabeth Loftus.
Il y aurait
beaucoup à dire sur tous ces arguments, assénés
comme des principes indiscutables. Car s'ils relèvent pour
beaucoup du bon sens et sont souvent féconds en recherche
ufologique, je suis néanmoins très critique sur leur
mauvaise utilisation récurrente par les sceptiques. Pris
individuellement chacun de ces outils méthodologiques est
valable. Mais c'est évidemment dans leur application,
éminemment subjective elle, que tenants et sceptiques divergent
souvent. Mais ceci nécessiterait
un dossier à part entière tant le sujet est vaste,
voilà qui nous éloigne trop de Roswell.
Anecdote illustrant la chose : GF dénonce le fait que les pro-ET
tentent d'atténuer le témoignage soit-disant
génant de Bessie Brazel en raison de son jeune âge
à l'époque (14 ans), alors qu'il fait exactement de
même contre le témoignage de Jesse Marcel Jr (11
ans à l'époque) page 106, parce que celui-ci parle de
"poutrelles
metalliques avec des hiéroglyphes" !
Prologue : la petite fille et le ruban à fleurs
L'auteur expose ici son argument majeur contre la piste
extraordinaire/pro-ET du cas Roswell. A savoir le témoignage de
la fille de Brazel, Bessie, qui décrit des débris
très ordinaire, et plus particulièrement du ruban scotch
à fleurs qui renforçait la structure type
"cerf-volant". Scotch à fleurs mentionné lui aussi par
Mac Brazel lui même dans le Roswell Daily Record du 9 juillet
1947, donc en théorie avant toute "contamination" par un
éventuel cover-up militaire.
Or pour l'auteur ce scotch à fleurs est si inhabituel, si
étrange, si spécifique aux débuts du programme
MOGUL, qu'il ne peut s'agir du coïncidence ; il est
invraisemblable d'imaginer qu'un vaisseau extraterrestre
écrasé dans le coin aurait "comme par hasard" parmi ses
débris quelque chose d'exactement semblable à du scotch
à fleurs.
Cet argument est pertinent et l'un des plus forts en faveur de la
thèse du ballon MOGUL. A ce stade je ne vois que deux
contre-arguments, plus précisément une question et une
hypothèse.
La (double) question est celle-ci : est-on certain qu'il y avait des
cibles
radar ML-307 sur le vol MOGUL N°4 censé expliquer ces
débris et si oui est-on certain qu'il y avait du scotch à
fleurs sur ces cibles radar ? On verra plus loin que ces questions
n'ont rien de trivial et qu'en tout état de cause il n'y a
à ce jour aucune preuve formelle et tangible à ces deux
affirmations, sinon l'USAF en 1994 ou un enquêteur sceptique,
l'aurait déjà trouvée.
L'hypothèse elle, déjà formulée par
d'autres
ufologues pro-ET, serait que Brazel a trouvé les débris
d'un
engin ET crashé par coïncoidence sur un champ où
avait atterri peu avant un ballon du programme MOGUL avec ses cibles
radar. Ce serait certes une belle coïncidence, mais tout de
même bien moins improbable que celle d'un vaisseau ET ayant parmi
ses composants du ruban scotch à fleurs.
IV La vague de juin-juillet 1947
Ce chapitre replace les "soucoupes volantes" et les "disques volants"
dans le contexte socio-historique très particulier de la
période mi-juin à mi-juillet 1947. L'auteur entend
démontrer que cette vague d'observations d'OVNIS fut en
réalité un mécanisme essentiellement
médiatique, auto-entretenu ensuite par le désir de
notoriété, à partir du récit initial de
Keneth Arnold le 24 juin 1947 dans le Nord-Ouest des USA.
Je ne suis pas d'accord avec cette position, reprise d'ailleurs plus
loin dans le livre notamment lorsque GF parle des "soucoupes de
papier". Si c'était aussi simple il y aurait des "vagues"
d'OVNIS en permanence étant donné qu'il y a en permanence
ou presque des stimuli (des témoignage d'OVNI) et des
médias avides d'audience. Je ne nie pas l'emballement et
l'auto-suggestion, mais seule une étude sérieuse de tous
les cas
(en éliminant rapidement les cas non documentés ou
douteux) permettrait de conclure. C'est impossible et de ce fait je ne
suis pas partisan de
l'étude "statistique" des OVNIs car le rapport signal/bruit est
trop faible, on peut se tromper dans un sens comme dans l'autre.
Mais cela dépasse nettement le cadre de Roswell et nous
entrainerait trop loin. Retenons uniquement à ce stade le
contexte de l'époque, le cas de Roswell arrive en effet à
un pic de témoignages d'observation d'OVNIS et de "buzz"
médiatique.
L'auteur entend également démontrer qu'à cette
époque les mots tels que "flying discs" ou "saucers" n'avaient
aucune connotation extraterrestre, que c'était juste un moyen
rapide de désigner un "machin bizarre dans le ciel".
Je suis globalement d'accord avec cela, et la copie du sondage Gallup
de 1947 page 35 le montre bien. Je nuancerai nanmoins un peu.
D'une part il faut toujours se méfier des sondages. Le sondeur
peut avoir ses propres biais et par exemple ne voudra pas mentionner
l'hypothèse "véhicule extraterrestre" car elle lui parait
plus que farfelue, incompatible avec le sérieux requis par une
maison comme Gallup. Ou bien il ne s'intéresse pas trop à
ces sujets en général et a traité ce questionnaire
par dessus la jambe, après tout c'est juste un job pour
subsister...
D'autre part si "flying disc" ne voulait pas nécessairement dire
"vaisseau ET", cela pouvait aussi
dire cela. Depuis la fameuse
émission radio d'Orson Welles en 1938, jusqu'aux récits
exotiques et aux couvertures criardes des Pulp Magazine comme le
Amazing
Stories de Ray Palmer, le grand public américain n'était
quand même pas totalement ignorant des histoires de vaisseaux
spatiaux venus d'ailleurs pour conquérir la Terre avec des
Martiens à bord (on disait souvent "martien" comme
générique pour "extraterrestre").
Et lorsque cette vague d'observations commença fin juin 1947,
l'explication "extraterrestre" fut elle aussi envisagée, certes
sur un ton ironique, parmi d'autres. Dans la région même
de Roswell, le 1er juillet, on pouvait par exemple lire ceci dans la
presse (source = http://www.roswellproof.com/ramey_and_kalberer.html) :
Fort Worth Star-Telegram, July 2, p. 6
'DISCS' BEFORE THEIR EYES!
Platter Planes Poohed by Flier and Astronomer
By Robert Near
Added reports of those
strange
flying discs reported seen in the sky by residents of West Texas and
elsewhere caused Col. Alfred F. Kalberer, 8th Air Force intelligence
officer, and Oscar Monnig, Fort Worth amateur astronomer to give
renewed assurance Tuesday [July 1] that "we're not being invaded by
little platter-like planes from Mars."
Un officier de renseignement de la 8ème armée
basée à Fort Worth, disait textuellement "Nous ne sommes
pas envahis par des sortes d'avions en forme d'assiettes venant de
Mars". Dans la même page Web on trouve d'ailleurs aussi un
extrait d'interview du Général Ramey.
V La grande fanfare
L'auteur entend discréditer ici une demi-douzaine des plus
importants témoins directs cités usuellement par les
pro-ET, dont Glen Dennis, Jim Ragsdale, Franck Kaufmann, ou
Gérald
Anderson.
Jusque là je suis volontiers GF. Je n'ai pas
particulièrement étudié cette partie du dossier
(rien que la partie traitant des débris représente
déjà une montagne à maitriser), mais globalement
ces
témoins me paraissent effectivement douteux, voire franchement
affabulateurs pour certains.
Il cite également d'autres témoignages (Blanchard,
Kimbal) pour étayer le fait que l'activité de la base de
Roswell était parfaitement normale le 8 juillet et les jours qui
ont suivi, citant même l'anecdote d'un tournoi de football le 11
juillet ou de Blanchard parti en vacances juste après le 9
juillet.
Tout cela semble exact, mais je prendrai néanmoins le temps de
vérifier cela moi même ultérieurement.
Par ailleurs cela ne me parait pas hélas incompatible
avec un cover-up militaire top-secret suite à la
découverte de vrais débris ET. Au contraire, dans ce cas
les autorités compétentes auraient justement tout
intérêt à faire diversion, à banaliser la
situation, à mettre un minimum de personnes dans la confidence,
à encourager des activités ordinaires.
Je dis "hélas" car le propre d'un complot réussi c'est
justement de ne pas être visible, de ne pas laisser de traces
.... sauf tardivement, lorsque des acteurs de la dissimulation sont
pris de remords sur la fin de leur vie, et , n'ayant plus peur des
conséquences, se lâchent et disent la
vérité. Et encore, même à ce moment
là, le bon complot peut résister. Car, si longtemps
après les faits, comment prouver quoi que ce soit, qui va
vérifier ?
VII A la recherche des sources
GF introduit ici le fameux vol N°4, celui que le rapport de l'USAF
en 1994 présente comme responsable des débris
retrouvés sur le ranch Foster.
Effectivement un vol dit N°4 a décollé le 4 juin.
Gildas Bourdais entre autres a tort de le nier, il interprète
mal les documents et témoignages.
Mais arrive ici mon premier désaccord majeur avec GF. Ce vol
n'avait en effet pas du tout selon moi la composition d'un train
MOGUL "normal", tel qu'indiqué dans le tableau de Charles Moore
(tableau recomposé très tardivement et de mémoire
et publié dans un livre en 1997).
Ce tableau tendrait à nous faire croire que ce vol était
un vol en configuration MOGUL quasi complète, presque identique
au vol N°2, à quelques exceptions près. Pour Moore il
comportait 28 ballons et une charge composée d'une bouée
sonar, de cibles radars, d'un lest en sable et d'un lest liquide, plus
divers autres équipements mineurs.
Or le texte du journal de Crary est clair. Le vol MOGUL "normal" a
été annulé à cause du vent. A la place il
dit qu'a été lancée une simple bouée sonar
("regular
sonbuoy") attachée à une grappe de ballons
("cluster of balloons").
Rien ne prouve qu'une ou plusieurs cibles radars, ou quelque autre
équipement, y ait été attaché aussi. De
même l'expression "cluster of balloons" au lieu de "the balloons"
tout court montre qu'il s'agissait de quelques ballons seulement, parmi
ceux qui avaient déjà gonflés, juste assez pour
soulever un seul équipement, la bouée sonar (donc
probablement une douzaine de ballons néoprène 350g).
Pour en avoir débattu avec GF sur le forum des sceptiques du
Québec je pense que ce sujet (le vol N°4) nécessite
une enquête spécifique et donc je ne développerai
pas ici. J'essaierai de présenter mon analyse
ultérieurement dans une page dédiée.
L'auteur reconnait ensuite avec honnêteté qu'il est vain,
faute d'informations météo fiables, de vouloir
reconstituer le vol N°4 est déterminer où il aurait
pu atterrir. Il disqualifie ainsi les travaux de Moore lui même
qui s'est charné (avec pas mal de mauvaise foi malgré ce
qu'écrit le sceptique Tim Printy) à démontrer
qu'il avait bien atterri sur le Ranch Foster.
GF persiste néanmoins à trouver "très raisonnable
une arrivée au ranch [Foster]". Ma foi si c'est
indécidable comment peut-il dire cela, sur la seule foi de
relevés météo et de la direction des vents
dominants de villes voisines ? Il y a trop de facteurs manquants, les
vents changent souvent selon l'altitude, bref cela reste
hypothétique au plus haut point. Le seul fait
avéré c'est que le vol N°5, le lendemain, est
tombé 25 miles à l'est de Roswell, soit assez loin de
l'endroit où ont été trouvés les
débris qui nous occupent (au nord ouest de Roswell). Et une des
annexes du rapport USAF de 1994 montre clairement via une carte NYU
d'époque, que la zone de récupération des trains
lachés depuis Alamogordo s'étendait à l'ouest de
ce site, alors que le ranch Foster, au Nord-Est de Roswell,
était situé en dehors de cette zone. Y
récupérer un vol MOGUL relevait donc,
météorologiquement parlant, d'un concours de
circonstances certes pas impossible à 100% mais rare et
imprévu par définition.
Le fait que le journal du Dr Crary n'ait pas été
trafiqué par l'armée pour y ajouter la mention explicite
de cibles radar sur le vol N°4, ou une direction d'envol compatible
avec le ranch Foster est alors présenté par GF
comme la preuve qu'il n'y a pas eu cover-up. Quel étrange manque
de discernement. Ce document date de l'époque (1947), il n'y
avait nul besoin alors de renforcer l'hypothèse MOGUL puisque
l'explication bien plus ordinaire d'un simple "ballon
météo" a convaincu tout le monde à
l'époque, en quelques heures à peine.
D'autre part GF parle ici du cover-up d'un incident "extraterrestre" ;
mais d'aucuns dont CB Moore lui-même prétendent qu'il y a
aurait-eu cover-up pour protéger alors le projet MOGUL. Dans
cette hypothèse, il est "normal" que ledit journal ne mentionne
rien qui pourrait trahir ce "secret".
L'interview de Brazel :
Les articles du 9 juillet parus dans divers journaux locaux sont
l'argument principal de GF pour accréditer l'explication
ordinaire de Roswell. On comprend pourquoi ; Brazel y décrit en
effet des débris très ordinaires, très semblables
à ceux d'un ballon météo et d'une cible radar, et
incluant même le si particulier scotch à fleurs,
impossible à inventer, tant il est à la fois hautement
inhabituel et aussi la "signature" du projet MOGUL. GF précise
même qu'il accorde beaucoup de valeur à ces sources car il
s'agirait d'interviews de Brazel, donc comme s'il avait
témoigné directement.
Je reconnais que ces articles relatant les propos de Brazel le 9
juillet sont une des pièces maitresses en faveur de la
thèse MOGUL. D'autant plus que je n'ai pas trouvé de
preuve convaincante
dans la thèse pro-ET qui veut que Mac Brazel ait fait ces
déclarations sous contrainte militaire, et alors qu'il
était gardé en rétention forcée. Certains
témoins disent cela, d'autres non, je ne sais que conclure.
Il me faudra néanmoins étudier plus attentivement cette
partie des témoignages.
En revanche je reste dubitatif sur la date de la découverte,
supposément le 14 juin, alors que les premières
dépêches parlait de "la semaine dernière", c'est
à dire début juillet. D'autres sources en effet, par
exemple l'affidavit de la propre fille de Brazel, "Bessie",
âgée alors de 14 ans, affirment que la découverte a
bien eu lieu début juillet, "autour du 4 juillet". Ce qui
porterait un coup sérieux à la candidature du vol N°4
lancé rappelons le un mois plus tôt, le 4 juin.
Inversement GF évacue en une phrase une autre source
génante, la dépêche DXR54, United Press, du 8
juillet qui elle parle d'une découverte des débris "la
semaine dernière", donc tout début juillet. Et cela au
prétexte que ce ne serait pas un témoignage direct de
Brazel, dont le nom n'est même pas cité.
Pourtant les sceptiques sont souvent les premiers à rappeler que
les sources les plus anciennes sont souvent les plus fiables, car non
encore susceptibles d'avoir été contaminés,
déformées, maquillées.
D'autre part, et je l'ai expérimenté personnellement, les
articles de journaux sont loin d'être des parfaits reflets de la
réalité en général, et des propos tenus par
la personne interviewée en particulier. D'un autre coté
une autre dépêche d'agence émise moins d'une heure
après donnait déjà la mention "il y a trois
semaines"...
Bref, là encore, comme pour les modalités du vol N°4,
ce sujet de la date de la découverte des débris
nécessiterait un article dédié, et
représente un second point de désaccord majeur avec GF.
L'inspection des débris par l'équipe de Marcel
Se basant principalement sur deux articles de journaux du 9 juillet
1947, celui du Roswell Daily Record et celui du Fort Worth Star
Telegram, GF souligne ici élément par
élément la correspondance quasi exacte entre la
description des débris par Brazel et Marcel, et les
éléments constitutifs d'une cible radar ML-307
telle que celle utilisée par le programme MOGUL.
Au § suivant "Les probabilités et les coïncidences",
GF montre qu'une telle concordance, renforcée par le
témoignage du colonel Trakowsky (qui accrédite
l'utilisation du ruban mauve à fleurs), ne peut pas être
une simple coïncidence, et que même les militaires de
Roswell ont pu être trompés par un matériel si
inhabituel à l'époque. La page 124 est un excellent
résumé de cet argument.
Le chapitre VIII enfonce le clou en précisant le degré de
corrélations entre les débris décrits par les
témoins et ceux d'un train MOGUL. Non seulement ils sont proches
en apparence, volume, taille et agencement, mais surtout il n'y a pas
de description par les témoins de débris d'une nature
significativement différente (par exemple un spheroide
transparent ou une boite avec des antennes).
Cet argument est effectivement, avec le scotch à fleurs, l'un
des plus forts
du livre et de la thèse prosaique / MOGUL.
Cette partie de l'histoire comporte néanmoins plusieurs points
peu clairs, incohérents ou en apparence difficilement
compatibles en l'état avec la thèse officielle
(MOGUL/NYU). Certes les sceptiques vont m'accuser
d'hyper-critique aigue, mais je pense que tous ces "petits
détails", comme dirait l'inspecteur Columbo, mérite
vraiment d'être d'être investigués.
Tout d'abord il faut noter que les articles de presse de cette
journée du 9 juillet se résument à deux sources
principales : l'article du Roswell Daily Record, interviewant William
Brazel, et tous les articles de journaux qui ne font que reprendre les
propos des dépêches d'agence (AP) ou des propos
téléphoniques de l'armée, dont celui du
général Ramey qui "dégonfle" l'affaire en la
ramenant à un simple ballon météo. Je ne connais
pas l'article du Chicago Tribune que cite GF mais je parie qu'il en va
de même et que cet article n'a aucune source inédite.
L'article du Fort Worth Star Telegram (édition de
l'après-midi) se démarque un peu de la trame des autres
notamment en citant en sus des propos rapportés par le major
Marcel lui-même.
Donc s'il y a bien eu cover-up avec construction d'une version
"officielle" par l'armée de l'air dès le 8 juillet en
milieu de journée (pure hypothèse à ce stade), il
est logique que tous les
articles basés sur une source militaire à Fort Worth,
décrivent les mêmes débris.
Un autre point qui me parait encore étrange à ce stade
est la nature des débris, totalement inconnue et
mystérieuse pour les locaux et les militaires de Roswell, mais
banals
et identifiés au premier coup d'oeil pour les militaires de Fort
Worth (Ramey avait visiblement déjà de gros doutes bien
avant l'intervention décisive d'Irving Newton) et même
Cavitt dès le 7 juillet.
En admettant que ces cibles radar étaient inconnues des fermiers
et militaires de Roswell, comment n'ont-ils pas reconnu
immédiatement les débris de ballon en caoutchouc, pour le
coup très ordinaires et qui devaient nettement surpasser en
quantité les débris de cible ? J'y reviens plus loin,
notamment dans le § "Les photos
tronquées et les cassettes inaudibles".
A noter que l'argument comme quoi les témoins emploient des mots
comme "tiges", "ruban", ou "balsa"
n'est en aucune manière décisif ni à prendre au
pied de la lettre. Pour décrire quelque chose d'inconnu tout
être humain va avoir naturellement tendance à utiliser des
analogies, des mots le plus proche possible de ce qu'ils ont vu.
Enfin, autre exemple de petit détail" : comment les motifs du
scotch à fleurs auraient-ils pu déteindre et s'imprimer
directement sur les baguettes de balsa ? C'est impossible a priori
puisque ce scotch était par définition sur les baguettes.
D'autre part il n'a pas plu durant cette période.
Troisième partie : du déni
IX Mythe et mystifications narratives
Ce chapitre remet en cause des témoignages tardifs (post 1989)
et indirects
en faveur non plus seulement de débris étranges, mais
carrément d'un vaisseau ET écrasé et de ses
occupants
"aliens".
Là encore je n'ai rien à dire contre GF, en majeure
partie parce que je n'ai guère étudié cette partie
de l'affaire, mais aussi je l'admets parceque ces témoignages
paraissent effectivement très douteux.
Page 138 l'auteur minimise en revanche de manière
déloyale le
témoignage de Dubose, témoignage effectivement
dérangeant car allant contre la thèse ordinaire (ballon
MOGUL/NYU) et accréditant le cover-up militaire. Exemples de
cette présentation déloyale :
"Un certain Dubose" : expression péjorative et
imprécise. Alors que GF sait pertinemment que ce Thomas Dubose
est loin d'être n'importe qui. C'est un colonel, l'adjoint direct
de Ramey, le N°2 de la base de Fort Worth, quartier
général de la 8ème armée, et témoin
clé dans cette affaire !
"Dans un document celui-ci affirme la dissimulation ..." : pas
n'importe quel document. Dans un affidavit (signé donc devant un
homme de loi) et dans une interview vidéo en 1991 (source :
http://www.roswellproof.com/dubose.html), entre autres.
"tout en affirmant qu'aucune pièce n'a été
changée" : dans un seul document, rapporté par un tiers
et contestable (j'y viens juste après)
Or dans son affidavit Dubose dit par exemple :
(7)The material shown in the photographs taken in Maj. Gen.
Ramey's
office was a weather balloon. The weather balloon explanation for
the material was a cover story to divert the attention of the press.
Autrement dit Dubose affirme qu'il y a eu cover-up et substitution des
débris !
Etrangement le témoignage de Dubose est également
éludé et plus qu'amoindri dans le fameux rapport de
l'USAF en 1994. Son nom n'est même pas cité !
Le lien que je donne plus haut
(http://www.roswellproof.com/dubose.html,
sur le site de David Rudiak)
liste d'autres interviews où Dubose a donné la
même version (ie : dissimulation par l'armée,
échange des débris). Pourquoi GF ne les cite-t-il pas et
pourquoi ne retient-il qu'une seule interview, celle parue dans le
livre de Korff en 1994 ?
Or dans ce livre, Korff ne fait que rapporter des propos d'une autre
personne (Shandera) qui dit rapporter les propos de Dubose. Pour toute
personne objective cela aura toujours moins de
crédibilité et de poids qu'une interview directe
filmée en vidéo, et un affidavit signé, du
témoin lui même (Dubose)
A noter que Shandera n'a pris aucune note et n'a rien enregistré
sur bande lors de son interview de Dubose. Etonnant et somme toute
dommage. Son témoignage (car ce n'est que ça) a donc
finalement moins de valeur que celui (plus direct, et
matériellement tracé) de Dubose.
Shandera semble d'ailleurs un curieux personnage dans l'ufologie
américaine. C'est lui qui avait reçu le premier document
mystérieux sur " Majestic 12 ", sous forme de film dans un
paquet anonyme et l'avait divulgué avec William Moore en 1987,
avec les conséquences néfastes pour la
crédibilité de l'ufologie en général que
l'on sait. Moore a
avoué en 1989 à la convention du MUFON à Las Vegas
avoir collaboré à la
désinformation militaire et il est complètement
discrédité. Qui dit que Shandera n'a pas fait de la
désinformation, sur
Majestic-12 d'abord puis sur Dubose ?
Pages 139 à 144 GF continue à mettre en doute
la partie "cadavres ET" du cas Roswell et les témoignages
indirects et tardifs, voire carrément douteux comme celui de
Glenn Dennis. Comme indiqué précédemment je suis
en accord avec lui jusque là.
Puis "subitement" il enchaine sur la réfutation d'un autre
témoignage, celui de Walther Haut ; témoignage
génant car c'est un
affidavit (signé devant homme de loi), d'un témoin bien
placé de l'époque, et en faveur du crash, de cadavres ET
et du cover up.
Or cette réfutation est hâtive et déloyale, non
étayée. GF insinue en effet que Haut l'a fait pour de
basses raisons
mercantiles en tant que président du musée de Roswell
consacré à l'affaire. Ou bien qu'il aurait peut
être subi l'influence néfaste du vice-président du
même musée, Glenn Dennis, dont effectivement on peut
douter de la sincérité du témoignage.
Enfin j'extrapole, je devine. Car GF ne dévoile pas sa
pensée. Il accole simplement au nom de Haut les items
"musée de Roswell" (dont il précise bien qu'il est
"lucratif" et génère 5 M$ de chiffre d'affaires) et
"Glenn Dennis" (dont GF a dit tout le mal qu'il pensait depuis le
début de son livre).
C'est un procédé réthorique connu, mais ça
ne prouve en l'occurence rien contre Haut. Au contraire, le fait
même qu'il ait renouvelé son premier
affidavit par un second témoignage à n'ouvrir
qu'après sa mort et encore plus pro-ET, prouve bien qu'il n'y
avait aucun intérêt (financier) personnel dans cette
histoire. A moins d'imaginer qu'il avait un tel amour passionnel pour
la ville de Roswell qu'il voulait à tout prix, même en
faisant un énorme mensonge, assurer à cette
dernière la
pérénité de la rente financière que lui
assure le "cas" Roswell ?! Allons ...
Quant aux dessins "humoristiques" de Raoul Robe qui terminent ce
chapitre, ils n'ont aucun rapport avec Haut et ne sont
évidemment placés à cette place incongrûe
que pour contribuer à décrédibiliser un peu plus
ce témoignage.
Bref il y a suffisamment de vrais arguments pro-ballon et anti-ET dans
ce dossier pour ne pas avoir besoin de tomber dans le
dénigrement des personnes. Dommage.
Rétro-technologie plutôt rétro
Là je suis d'accord avec GF. Les allégations des pro-ET
à
propos d'une rétro-inégnierie des débris par le
Batelle Institut qui aurait abouti à la "découverte" des
matériaux à mémoire de forme sont non
prouvées, voire farfelues. Rien de solide ni de probant
là dedans
Les photos pages 150-151 en revanche sont extrêmement
intéressantes. On peut d'ailleurs les trouver en bien meilleure
qualité sur le site de David Rudiak, notamment la photo et
l'article du Fort Worth Star Telegram :
http://www.roswellproof.com/FWSTJuly11.html
L'épisode qu'elles relatent montre en effet que le 10 juillet,
soit peu après la fameuse conférence de presse à
Fort Worth ravalant le mystérieux Flying Disk au rang de simple
ballon météo, l'armée de l'air était
capable de faire voler au même endroit un ballon similaire,
équipée de la même cible radar ML307, et de les
suivre au radar (le camion au second plan). Tout cela alors que l'on
nous dit que ces équipements (cible radar et radar de poursuite)
étaient très rares à l'époque et non
utilisés à Roswell ou Fort Worth. L'armée de l'air
n'a eu pourtant aucun mal à se les procurer en 24 heures. Soit
qu'en réalité il y en eut déjà sur place,
soit qu'ils les
aient fait tout simplement venir d'une base proche en possédant.
Par exemple ... Alamogordo, le terrain d'essai tout proche (en avion)
où justement on utilisait ces équipements dans le cadre
du projet MOGUL !
Accessoirement ces photos montrent également à quel point
une cible radar ML307 est petite, minsucule même comparée
à l'étendue d'un ranch. Comment une cible radar de ce
type (ou même deux ou trois) auraient elles pu donner des
débris en quantité suffisante pour couvrir –
même de manière très éparse - les ¾
de miles (Marcel Sr) ou même les 200 yards (Brazel)
décrits par les témoins ?
D'autres photos et articles intéressants sur des
démonstrations de ballons et
cibles radar par l'armée à la même date pour
expliquer les "disques volants" sont disponibles sur le même site
à cette adresse :
http://www.roswellproof.com/balloondemos.html
D'autant plus que le vol Mogul N°4 n'avait
peut être aucune cible radar !
Car la composition alléguée de ce vol par les sceptiques,
dont GF, est basée sur les notes de Moore (en substance idem vol
N°2
moins radiosonde, plus ballast liquide), et correspond au vol MOGUL
normal tel qu'il était prévu le 4 juin. Or ce vol MOGUL
n'a pas eu lieu à cause du vent, c'est écrit noir sur
blanc dans les notes du Dr A. Crary.
A la place – et probablement pour ne pas gâcher les ballons
déjà gonflés d'Helium – ils ont laché
une simple bouée sonar accrochée à une grappe de
ballons. Le test porta alors visiblement sur ce seul équipement,
comment cette bouée notamment émettait ces données
et comment elles pouvaient être reçues à distance,
par un avion ou par la station au sol, ce qui avec la technologie de
l'époque était loin d'être évident et
simple.
Mais aucune mention d'autres équipements, et en particulier de
cible radars, par ailleurs inutiles pour le test évoqué
précédemment. La description du vol N°4
d'après ses souvenirs 50 ans plus tard est
d'ailleurs improbable pour une autre raison. Imaginez : avec une
bouée sonar, 3 cibles
radar, au moins une douzaine de ballons pour enlever le tout, un
ballast automatique, un suivi radar par avion jusqu'à Arabella
et un suivi optique au théodolite
.... qu'est-ce qui distinguerait alors ce vol soit disant "raté"
d'un vol NYU "normal" ? Pas grand
chose en fait cela aurait été quasiment le premier vol
réussi alors que Crary, le jour même, note par
écrit "no balloon flight again".
Cover-Up ?
Au demeurant, si Moore a selon moi tendance à inventer des
équipements absents du vol N°4, il reste que le seul
équipement dont nous sommes certains qu'il était bien
présent, la bouée sonar, n'a pas été
retrouvé, n'est mentionné par aucun témoin, et
bien entendu n'apparait sur aucune des 6 photos de Fort Worth.
Génant pour la thèse MOGUL.
C'est peut être pourquoi, avec quasiment les mêmes mots que
le rapport de l'USAF, GF
s'empare d'un débris en forme de "bouteille Thermos
géante", soit disant présent "dans la littérature
pro-ET", et lui trouve aussitôt une ressemblance frappante avec
la bouée sonar modèle AN/CRT-1 telle qu'elle était
justement utilisée sur les vols MOGUL.
Mais qui dit cela, quelle est la source et est-elle fiable ? Ma foi,
rien n'est moins sûr.
La seule et unique source semble être le livre de Kevin Randle
and Don Schmitt, "The Truth About the UFO Crash at Roswell", 1994 (et
non
leur livre précédent, "UFO Crash at Roswell", 1991, comme
indiqué je pense à tort par GF, mais j'avoue ne pas
posséder ces livres).
J'ai en effet retrouvé trace de ce témoignage sur le site
(pro-ET) de David Rudiak, Roswellproof.com. En l'occurence sur cette
page : http://www.roswellproof.com/debris3_misc_metal.html
:
Extrait :
"JOHN G. TIFFANY
(Tiffany's father was stationed at Wright Field. His
unit was
sent to Texas where they picked up metallic debris and a large cylinder
that reminded them of a giant thermos bottle)
(R&S2, describing the metal) Tiffany said the metal
was very
lightweight and very tough. It had a smooth glasslike surface,
and everything the flight crew did to it to mark it, bend it, or break
it failed. But what really bothered the flight crew was the
unusual cylinder and its unknown contents. After the flight, the
crew felt that they couldn't get clean. They could not "get over
handling something that foreign."
Un seul témoin donc, très indirect en plus (dires de John
Tiffany, rapportés ensuite par sa fille, rapportés enfin
par R&S) et non recoupé par un autre témoignage.
Noter aussi que le témoin prétend avoir
récupéré ces débris au Texas, et non pas
à Roswell ou Fort Worth.
Typiquement un cas de deux poids et deux mesures. Si un "tenant" pro-ET
avait
avancé un argument aussi faible, GF l'aurait certainement mis en
doute et à juste titre. Ou alors il faut prendre au
sérieux tout le témoignage, et accepter dans ce cas qu'il
y avait, en plus de la "bouteille Thermos" du métal
extrèmement léger et très résistant, qu'on
ne pouvait ni marquer, ni plier, ni briser !
Quant à moi je reste aussi exigeant. J'ai rejeté comme GF
nombre de témoins tardifs et douteux des cadavres d'ET, et je
rejette aussi cette "preuve" de la présence de la bouée
sonar. Bien évidemment si des preuves plus solides
étaient découvertes demain, je réviserai mon
jugement.
L'étrange amnésie (page 157)
GF s'étonne ensuite des 30 années de silence dans la
communauté ufologique qui ont suivi cette affaire,
jusqu'à sa redécouverte accidentelle par Stanton
Friedmann en 1978. Il s'étonne également que les
protagonistes et témoins directs, qui auraient du être
marqués par une affaire aussi extraordinaire, n'aient rien
gardé, aucun débris étrange, même pas
quelques photos qui auraient permis aujourd'hui d'éclaircir
l'affaire (les seules photos étant celles prises par Bond
Johnson lors de la conférence de presse à Fort Worth).
Il marque là un point, indubitablement. C'est aussi un autre
argument fort en faveur d'une explication "ordinaire".
Néanmoins, histoire de raisonner, ces incohérences
apparentes peuvent peut être s'expliquer, en spéculant un
peu.
Les témoins militaires pour commencer étaient peut
être tout simplement tenus au secret ou au simple devoir de
réserve. Dans ce cas on peut s'attendre à ce que certains
d'entre eux, sur la fin de leur vie, voire dans dans leur testament,
révèle enfin leur vérité. Or justement deux
militaires en liaison directe avec ces évènements au
moins ont
témoigné sous serment en défaveur de
l'hypothèse ordinaire (ballon MOGUL) : le colonel Dubose et le
lieutenant Haut. Comme on l'a vu précédemment (notamment
au début du chapitre IX) le témoignage de Dubose
gène considérablement la thèse officielle, l'USAF
(qui ne le cite même pas !), les sceptiques en
général et GF en particulier. Dubose a laissé des
témoignages tangibles (affidavit et inteview vidéo
enregistrées) où il a répété
à plusieurs reprises sa version "extraordinaire" de l'histoire.
Mais les sceptiques ne veulent retenir qu'un seul témoignage,
celui rapporté par un interviewer sceptique ( Shandera ),
et totalement opposé et contraire aux autres témoignages
de Dubose. On comprend pourquoi, mais pour moi c'est du 'cherry
picking', de la sélection de données, inadmissible dans
une enquête objective.
Ensuite que le rancher Mac Brazel (et sa femme) n'ait rien voulu dire
de plus, même avant de mourir (avant 1978) n'est guère
étonnant non plus. Rappelons nous la dernière phrase de
son interview du 9 juillet ("si je trouve autre chose de moins
important qu'une bombe, vous aurez du mal à me faire dire quoi
que ce soit à son sujet"). Visiblement cet homme simple à
la vie tranquille a été bousculé et
perturbé par la notoriété soudaine acquise avec
son témoignage, et dépassé par l'ampleur que
l'affaire a prise. Certainement vexé d'avoir été
ensuite contredit très maladroitement et sans égard par
le militaires (qui ont clamé dès le 9 juillet que ce
n'était qu'un simple ballon météo alors que Brazel
avait dit qu'il connaissait ce genre d'équipements et que ce
n'en était pas un).
Eventuellement même selon certaines sources, il aurait retenu
prisonnier plusieurs jours et forcé de modifier son
témoignage dans l'interview parue le 9/07/47 ... mais là
je reconnais ne pas
bien connaitre cette partie de l'affaire ni avoir vérifié
la solidité des témoignages allant dans ce sens.
Que des personnes n'aient témoigné que 30 ou 40 ans plus
tard seulement (donc après 1978), sur la fin de leur vie, pour
soulager leur conscience, n'est peut être aussi qu'une
coïncidence après tout. En effet la plupart des
protagonistes de l'affaire étaient jeunes, voire très
jeunes au moment des faits, il est donc normal que leur fin de vie
arrive justement quelques décades plus tard. Mais bien
évidemment cela n'occulte pas l'explication tout aussi plausible
de la "contamination" médiatique ou du désir de
notoriété.
Enfin, que ces personnes n'aient rien gardé, ni débris ni
photos, n'est peut être pas non plus si inexplicable.
Après tout très peu de témoins ont
réellement vu ces débris et fort brièvement pour
la plupart, et ont été en position de les photographier,
a fortiori d'en garder. Les Brazel avaient-ils seulement un appareil
photo ? Mais il est vrai que ces témoins ne semblent pas avoir
gardé non plus de dossiers de presse, des coupures de journaux
ni s'être intéressé aux OVNIs ensuite. Cela peut
s'expliquer par la pression des médias et de la
société (aux USA comme ailleurs) qui a très vite
jeté les OVNIs et leurs occupants dans le royaume de la
zozoterie pour fumistes. Mais quand même, sur le nombre, on
aurait pu effectivement s'attendre à ce qu'au moins un garde un
intérêt et des traces tangibles (photos, articles de
l'époque ...).
En tous cas GF s'égare un peu page 159 en étendant
ensuite son explication des "soucoupes en papier" (les observations
d'OVNIS en tant que seul phénomène médiatique
auto-entretenu) à toute la vague de 1947. C'est son opinion,
soit, mais il ne le démontre pas. Il faudrait d'ailleurs
probablement un livre entier pour traiter cela et éventuellement
le démontrer. Seule l'étude précise et
fouillée de tous les cas concernés (ou d'un nombre
significatif et représentatif) permettrait une conclusion
objective. Mais on rejoint là mes commentaires du chapitre IV
sur cette vague de 1947.
Chapitre X Le péché originel
GF rappelle ensuite à juste titre les erreurs et embellissements
que Jesse Marcel a apporté à sa propre carrière
militaire. Il est en effet quasi certain au vu des pièces de son
dossier militaire que Marcel a nettement exagéré son
expérience de pilote d'avion, ses décorations et la
raison de ces dernières, ainsi que ses titres universitaires. Et
Gildas Bourdais, "le" défenseur Français du cas de
Roswell, a clairement tort de continuer à croire Marcel à
100% et à prétendre que Kevin Randle aurait
"démonté" les propos des sceptiques mettant en
lumière les erreurs de Marcel. Kevin Randle se contente de dire
que finalement ça n'a pas d'importance.
Et c'est aussi exactement mon avis. Je ne suis donc pas d'accord avec
GF lorsque page 165 il insinue que, puisque Marcel se trompe sur des
faits ordinaires, il se trompe aussi sur des faits (supposés)
extraordinaires. C'est faire un procès d'intention, attaquer la
personne et non le cas proprement dit. Ce n'est pas parceque Marcel a
exagéré ses récompenses militaires ou ses
compétences universitaires, qu'il exagère tout le temps
et sur tout. Par exemple nul ne niera que Marcel a toujours
été très bien noté dans sa carrière
militaire était apprécié, jugé très
compétent et a même été promu Lieutenant
Colonel de Réserve peu après, et non brimé. C'est
donc qu'il n'était pas un affabulateur pathologique, ni
même récurrent. Plus généralement je connais
des personnes ayant tendance à donner une image meilleure
qu'elle n'est réellement, à exagérer leurs
mérites, réussites ou réalisations ... mais qui
sont par ailleurs honnêtes, sincères, et rationnelles, et
à qui j'accorderai a priori ma confiance si elles venaient
témoigner avoir vu un OVNI (avant bien entendu d'enquêter
et de vérifier tout ça ;-).
Les photos tronquées et les cassettes inaudibles (p 171)
GF affirme ensuite que la thèse de la substitution de
débris lors de la conférence de presse de Ramey le 8
juillet à Fort Worth ne tient pas, car ce sont exactement les
mêmes
débris sur toutes les photos, celles avec Marcel et les autres.
Or celui-ci a affirmé que les vrais débris étaient
ceux présents sur les photos où il est présent, et
que des débris d'une cible RAWIN sont présents sur les
autres photos (celles avecRamey, Dubose, Newton).
Globalement je trouve cet argument bien vu et pertinent. C'est un coup
sérieux contre la thèse de la substitution et du complot
militaire pour cacher des débris "ET".
Pourtant, pour me faire l'avocat du Diable, lors d'une interview
ultérieure par Johnny Mann, Marcel donnera une explication a
priori vraisemblable de sa confusion. S'il n'avait eu jusqu'à
lors en effet que des photos tronquées de la conférence
de presse, dans lesquelles seule une infime partie des débris
est visible, il ne pouvait effectivement pas reconnaitre avec assurance
lesdits débris.
GF évacue néanmoins rapidement cette interview par Johny
Mann au prétexte qu'elle n'a pas été
enregistrée. Ma fois, certes, mais alors pas plus que la fameuse
interview de Dubos par
Shandera, comme par hasard la seule qui va dans le sens opposé
à toutes les autres interviews et témoignages de Dubose,
qui eux ont laissé des traces fort heureusement.
Il faut également noter que -sauf erreur de ma part –
Marcel n'a pas affirmé cela sous serment, dans un affidavit, et
en ayant les photos des débris sous les yeux. Il a dit cela de
mémoire, sans voir cette série de photos, qui
effectivement montrent toutes les mêmes débris, pour
autant qu'on puisse en juger.
Alors comment concilier ce premier témoignage de Marcel ("j'ai
été pris en photo avec les vrais débris") et les
photos montrant toutes des débris ordinaires de ballon et de
cible radar ?
Le plus simple serait d'imaginer qu'il y ait eu au moins un autre
photographe, par exemple militaire, par exemple chargé de faire
quelques clichés pour les dossiers de l'armée, et que
Marcel, 30 ans plus tard fait la confusion entre deux séries de
photos prises à très peu de temps d'intervalle.
Or justement la présence d'un second photographe est
confirmée par James Bond Johnson lui même, notamment dans
une interview par Dennis Balthazer en 2001 disponible sur ce lien : http://www.truthseekeratroswell.com/interview_James_Bond_Johnson.html
On peut y lire par exemple :
"DGB: The photograph of Irving Newton (weather officer at Fort
Worth
Army Air Field, left) was not taken by you, but very possibly taken by
an Army Air Force photographer, some time after you had taken your
photographs. Agreed?
JBJ: Agreed,"
Donc au moins une photo, celle d'Irving Newton avec les débris
n'est pas de James Bond Johnson. Marcel a pu alors vouloir dire qu'on
l'a d'abord photographié
avec les vrais débris, puis que Bond Johnson l'a
photographié dans le bureau de Ramey avec les débris
d'une vraie cible radar et d'un vrai ballon, apportés là
pour camoufler l'affaire (ce que corrobore le témoignage du
colonel Dubose).
Je relève aussi cet extrait du témoignage de Marcel,
cité par GF :
"En fait ces pièces pouvaient ressmbler à de
l'aluminium
et du balsa mais la ressemblance s'arrête là".
Cette phrase m'interpelle car, comme tant d'autres, je me suis
très longtemps demandé comment un homme normal, a
fortiori un militaire d'active, pouvait ne pas reconnaitre des
débris aussi banals que du balsa, du papier d'aluminium ou du
scotch. Le balsa en particulier m'intriguait, surtout eu égard
aux propriétés extraordinaires que les témoins
prêtaient aux "baguettes" mystérieuses (ininflammables,
incassables).
J'ai donc à mon tour acheté des baguettes de balsa de
section carrée ... et j'ai vérifié
expérimentalement en 30 secondes que ça se casse
très facilement, avec deux doigts seulement. De plus le moindre
choc les abime, et lorsque ça casse, ça ne rompt pas
nettement en laissant une section plane, mais au contraire cela se
"déchire" un peu, de manière très
caractéristique. Et une fois cassée,
l'extrémité de la baguette de balsa est encore plus
fragile, friable même. Les frottements, la simple manipulation
vont inéluctablement détériorer davantage le bout
de la baguette, et laisser s'échapper des petits morceaux de
balsa très légers.
J'ai toujours été étonné que ceci n'ait
jamais été signalé dans le cas de Roswell, jamais,
alors que les débris sont censés être très
abimés par leur long séjour sur un sol désertique,
caillouteux et soumis à tous les vents . C'est assez troublant
je dois dire. Mais peut être vais-je là aussi être
accusé de pinailler, de tomber dans l'hyper-critique.
Toujours à propos de l'état des débris, GF indique
page 180 que l'armée n'aurait pas pu en si peu de temps se
procurer une cible radar aussi abimée, pour la substituer aux
vrais débris comme l'affirme les pro-ET.
Je suis tout d'abord heureux que GF ne conteste pas que l'armée
aurait pu effectivement se procurer une cible radar dès le 8
juillet à Fort Worth. Et cela, très facilement
même, en dépit du fait que Fort Worth n'était pas
censé utiliser cet équipement à l'époque.
Je l'ai démontré plus haut, dans mon commentaire de la
photo de la page 151. Rappel :
http://www.roswellproof.com/FWSTJuly11.html
Sachant que différentes bases proches (toujours "proches" en
avion) utilisaient quotidiennement ces cibles (soit pour des mesures
météorologiques soit pour de l'entrainement au tir
anti-aérien), il n'était pas impossible qu'elles en aient
certaines abimées, par exemple retournées par des civils
les ayant retrouvées. Ou encore plus simplement, ne peut-on
imaginer que Ramey ait fait "veillir" manuellement une cible neuve
juste avant les photos ? Après tout, où est la
difficulté ? Il suffit de déchiqueter, de froisser, de
casser un peu, éventuellement de trainer 2 minutes dans la
poussière. Cela doit prendre 5 minutes à peine, montre en
main. Qui va venir vérifier ensuite avec un microscope ? "Les
Experts Las Vegas" ?
Nombre de grands tours d'ilusion sont basés sur des artifices
encore plus grossiers que cela. Non vraiment, je ne vois rien qui
aurait empêché l'armée de monter rapidement (moins
de 24 heures) un cover-up avec de faux débris.
Ce qui bien entendu, et j'insiste, ne prouve absolument pas
qu'elle l'ait fait. Ca démontre juste selon moi que ce
n'était pas impossible.
A noter étrangement que CB Moore, le principal atout de la
thèse MOGUL, défend une cover-story de l'armée
pour protéger à l'époque ce projet top-secret. Et
ce alors qu'une telle cover-story est formellement niée dans le
même rapport Weaver par le colonel Trakowsky, pourtant alors
Officier en charge de la sécurité du programme MOGUL. A
la fin de sa déclaration (annexe 21 du rapport de l'usaf) Moore
dit :
The July 10th Alomorgodo News article shows a demonstration of
some of
our multiple balloons and target trains. We had no one there so it was
surprising to see this. It almost appears that there was some type of
“umbrella cover story” to protect our work with MOGUL.
Ou plus loin
The July 10th Alomorgordo News report was a good cover-it does
not
appear to be a coincidence-I don’t know who may have initiated it.
Donc Moore dit qu'à part eux (NYU/MOGUL) il n'y avait aucune
cible radar de ce type, ni même de ballons dans le coin (!), mais
que l'armée a fabriqué la démonstration publique
du 10/07 pour détourner l'attention ?
Sauf que GF dans son livre, montre pages 191-193 plusieurs photos
extraits d'articles de presse de l'époque montrant des cibles
radars récupérées à la même
époque (début juillet).
Et le dernier paragraphe de la page 191 précise aussi que les
cibles radars lancées régulièrement par les
stations météo ne comportaient elles non plus aucune
marque d'identification ... Voilà qui amoindrit
énormément le propos de CB Moore qui faisait de cette
absence de marque une spécificité du projet MOGUL en
raison de son caractère secret.
Mais la réalité est encore plus complexe. Non seulement
il était très facile à l'armée de se
procurer des ballons avec cibles radars et camion-radar de suivi, mais
elle a organisé dès le 9 juillet et dans plusieurs villes
des USA des démonstrations devant la presse avec ces
équipements, pour dégonfler (si je puis dire) la vague de
témoignages sur les "flying discs". Certains prétendent
même que l'armée voulait désengorger les standards
et services d'enquête, qui auraient été
saturés et innefficaces en cas de réelle intrusion des
"rouges" (les soviétiques) !
Par exemple le 9/07 a eu lieu une démo à Alamogordo (le
centre opérationnel MOGUL au Nouveau Mexique) comme le montre
ces extraits d'articles de presse d'époque, toujours
tirés du site de David Rudiak :
http://www.roswellproof.com/Alamogordo_July9a.html.
Ces articles disent par exemple ceci :
« Experiments the experimental group from the
proving
grounds said, showed the early morning hours of from five to six to be
the most successful to gain the 30 to 40-thousand feet altitudes
attained by the device. »
Lancement entre 5 et 6 heures, exactement au moment où le jour
se lève (vérifiable, pour n'importe quelle date et lieu
sur cet excellent site :
http://www.ephemeride.com/calendrier/solaire/19/) ! Donc pas
à 3
heures du matin comme le prétend 50 ans plus tard CB Moore. Et
il y a d'autres indices très forts en faveur d'un lancement de
jour. Encore une erreur significative de Moore.
Ces articles disent aussi :
« The corner reflectors being periodically released
for this
purpose, he explained, and had been for the past fifteen months from
this local headquarters of the AMC under the Watson Laboratories group,
who have headquarters at Red Bank, New Jersey »
« A limited number of these balloons have been
released in
the past 15 months, Major Prichard said, the number increasing sharply
in recent weeks. »
Ces cibles radar étaient donc utilisées depuis 15 mois
dans le coin, et de plus en plus fréquemment récemment !
Encore une erreur de mémoire de Moore. Le programme MOGUL/NYU
utilisait au début des matériels standards, banals, faute
d'avoir reçu les équipements spécifiques
commandés (microphones spéciaux basse fréquence,
radiosonde légère, ballon polyéthylène,
...). Ces matériels n'étaient en rien "spéciaux",
seul leur usage l'était.
Ces articles disent aussi que toutes les cibles étaient
étiquetées :
« Property of Army Material Command, Watson
Laboratories,
Army Air Field, Alamogordo New Mexico ».
Ou dans un autre article :
« all have a tag reading
"Property of A.M.C. (Aircraft Materials Corps) [Note: Actually
stands for Air Material Command] Watson Laboratories Alamogordo Air
Field." »
Voilà des textes d'époque tangibles qui contredisent les
souvenirs de Moore 45 ans plus tard (encore une fois) dans sa longue
déclaration dans le rapport de l'USAF en 1994. J'y reviendrai
dans un autre article.
A la fin de la page 180 GF évacue également un peu
rapidement un autre fait en défaveur de l'hypothèse
prosaique. En effet, en dehors de la cible radar, il n'a jamais
été retrouvé un quelconque équipement qu'un
vol MOGUL de service était censé transporter, comme le
ballast automatique ou la bouée sonar, et bien entendu le fameux
"scotch à fleurs".
J'ai déjà montré dans ma critique du chapitre
"cover-up ?" que la découverte d'une "thermos géante"
pouvant être cette bouée sonar, était plus que
douteuse, et ne pouvait pas décemment être retenue comme
fiable, surtout par quelqu'un se réclamant du camp "sceptique"
et affichant une si grande méfiance vis à vis du
témoignage humain.
Voilà maintenant que GF "imagine" pour expliquer cette absence
très étrange (on ne voit sur les photos de Fort Worth
"que" la cible radar et peut être quelques débris de
ballon noircis), que Ramey a voulu écarter volontairement tout
ce qui pourrait relier l'affaire au projet MOGUL top secret.
Et quand je dis "écarter" je ne dis pas seulement
"sélectionner" les débris. Non, il a fallu que Ramey
fasse enlever (délicatement, pour ne pas abîmer davantage
les débris) ce fameux scotch à fleurs dont le rôle
était justement de solidariser le papier alumininisé sur
les baguettes de balsa.
Bref, GF est obligé lui aussi d'invoquer un cover-up, un
petit complot destiné à protéger le secret des
expériences MOGUL.
Oui mais voilà. Il n'ya aucune trace ni témoignage de
cela. Aucun témoin d'époque n'a jamais corroboré
cette version (toujours hormis l'incontournable Moore, 50 ans plus
tard). On n'a trouvé aucun télégramme, aucun ordre
ou échange avec le quartier général ou avec
Washington dans lequel Ramey disait faire cela, ou demandait la
permission de le faire, ou dans lequel on ordonnait à Ramey de
le faire. Ramey aurait fait cela seul, de sa propre initiative, sans en
référer à personne ?
Non seulement cela parait improbable, mais c'est clairement nié
par Trakowsky, pourtant officier en charge de la sécurité
du programme MOGUL, comme je l'ai indiqué
précédemment.
Bref, y-a-t-il eu cover-up le 8 juillet 1947 pour protéger le
projet MOGUL, de quelle nature, pourquoi n'en a-t-on retrouvé
aucune trace, et pourquoi l'armée en 1994 l'ignore ou le nie ?
Telles sont les questions qui se posent encore aujourd'hui et qui ne
sont pas selon moi des détails sans importance ni de
l'hypercritique.
Laplace et le télétype du FBI
La tentative de GF de justifier la présence du terme "forme
hexagonale" dans le télétype du FBI du 8 juillet (soit
avant l'identification formelle des débris par Irving Newton le
9 juillet à Fort Worth) ne me convainc pas du tout ... elle est
même très laborieuse et fragile.
Si, comme l'affirme GF et tous les sceptiques, les débris
étaient très abimés, trainés par le vent
sur la plaine depuis plus de 3 semaines (14 juin), alors bien malin qui
aurait pu en déduire leur forme d'origine. A moins de connaitre
déjà ce genre de cibles et de les avoir sous les yeux,
comme Irving Newton. Mais ce n'était certainement pas le cas du
contact du FBI au Quartier Général de la 8ème
armée. Tout au plus un néophyte aurait-il pu employer le
mot "kite" ("cerf-volant"), qui vient en effet rapidement à
l'esprit en voyant ces débris. C'est d'ailleurs ce mot "kite"
qui était très souvent employé par la presse
relatant les découvertes par des civils de telles cibles radar
à l'époque.
Mais la mention de la forme hexagonale et des 6 pointes dans la bouche
d'un agent du FBI qui n'a même pas été sur place et
qui dit tenir sa source d'un coup de fil du quartier
général de la 8ème armée à Forth
Worth, ne peut signifier pour moi qu'une chose. Ce terme lui a
été soufflé par son interlocuteur de
l'armée de l'air.
Peut être de bonne foi, ou involontairement parce qu'à
cette heure là en fin d'après-midi (18:17 CET) , la
conférence de presse a déjà eu lieu et que
l'explication "ballon météo" est déjà quasi
officielle.
Ou bien, si cover-up il y a eu ... pour justement consolider le
cover-up via une agence d'état.
Mais dans ce cas pourquoi mentionner que les débris ont
été quand même envoyés à Wright Field
pour examen supplémentaire, suite à un coup de fil
mettant justement en doute l'explication ballon+cible radar ?
Bref en l'état ce télex ne prouve pas grand chose selon
moi, ni dans un sens ni dans l'autre.
Conclusion
La plupart des arguments développés dans ce livre
étaient plus ou
moins présents dans la littérature sceptique depuis la
publication du rapport de l'USAF en 1994. Kent Jeffrey ou James Easton
par exemple les avaient apportés dès 1997.
Le mérite principal de ce livre est d'en présenter une
synthèse claire et documentée en Français (les
seuls livres francophones étant pour le moment ceux de Gildas
Bourdais, farouche pro-HET sur ce cas). Mais aussi la
recontextualisation de cette affaire et des "flying discs", à
une période de l'histoire où ce terme n'avait
effectivement pas la lourde connotation "extraterrestre" d'aujourd'hui,
et dans un court laps de temps (fin juin/mi-juillet 1947) où la
presse s'est pour la première fois embrasée d'une vague
de témoignages et d'excitation générale sur ces
mystérieuses "soucoupes volantes".
Comme je le disais en introduction, il me semble désormais que
l'explication de ce cas par le crash d'un vol MOGUL / NYU, comportant
des ballons néoprène et quelques cibles radar, tel que
décrit dans le rapport de l'USAF, est très plausible et
confortée par quelques arguments très forts.
Les débris décrits (notamment dans l'article du
Roswell
Daily Chronicle du 9 juillet et son interview de Brazel ) ressemblent
beaucoup à ceux d'un ballon sonde et d'une cible radar de type
ML-307 comme en utilisaient les équipes MOGUL ou certaines
stations météorologiques. Jusqu'à des sortes de
filins, des oeillets et même le fameux scotch à fleurs, si
spécifique des débuts du projet MOGUL.
En particulier, Brazel, même censément sous pression
des
militaires voulant organiser un cover-up, n'avait aucune raison de
mentionner du scotch à fleurs, qui n'a même pas
été utilisé ensuite lors de la fameuse
séance photos avec Ramey du lendemain présentant
l'explication du ballon météo. Témoignage
confirmé plus récemment par Bessie Brazel, la fille de
Mac Brazel ou Loretta Proctor
Inversement aucun débris n'a une apparence
significativement
différente des débris d'un ballon météo et
d'une cible radar (des bandes de caoutchouc, des baguettes, du ruban et
des feuilles déchiquetées). Pas de boite carré ou
ronde, pas de morceaux transparents ou complexes (avec un
mécanisme par exemple), pas de morceau très dense ou
visiblement metallique.
Le seul caractère extraordinaire de ces débris
serait
leurs supposées propriétés physiques "impossibles"
(incassable, ignifuge, mémoire de forme). Mais ces
propriétéssont apparues très tardivement (post
1978) et peuvent aisément être expliquées par un
enjolivement progressif. Il n'y a pas sur le moment ou avant 1978 de
témoignages directs sur des débris aux
propriétés extraordinaires.
Les affirmations encore plus extraordinaires (corps d'aliens,
vaisseau
crashé) sont le fait de témoins encore plus tardifs,
très souvent douteux voire menteurs, et nécessiteraient
de plus un second voire un troisième site de crash, ce qui
déroge au principe de simplicité (le moins
d'hypothèses possibles).
Enfin il est très étrange que ces témoins
tardifs
(post 1978, voire bien audelà) n'aient rien voulu dire avant,
n'ait gardé aucune photo des débris voire des
débris eux-mêmes, n'aient même pas gardé un
dossier avec des articles d'époque. Apparemment cette affaire
"extraordinaire" ne les a pas marqués énormément
jusqu'àce qu'elle se retrouve ultra-médiatisée
à partir des années 80
Pour autant je ne donne encore qu'une courte avance, 51/49, à
cette explication qu'on peut qualifier "d'officielle". Très
subjectivement je le reconnais, et certainement influencé par un
léger biais pro-HET, je relève en effet une foule de
"petits détails qui ne collent pas" dans la thèse
officielle. De plus je note aussi
de nombreux points en suspens, non expliqués, de questions sans
réponses. On ne peut préjuger de leur importance, ni si
leur résolution ferait pencher la balance d'un coté ou de
l'autre.
A ce stade de ma réflexion il me reste donc encore un gros
travail à faire pour les classer, vérifier, prioriser,
recouper et finalement les mettre en balance de la thèse
prosaïque.
Je publierai ultérieurement ces réflexions. Elles
tourneront notamment autour autour des thèmes suivants :
La nature justement très ordinaire des débris.
Seuls les
objectifs du projet MOGUL (repérer les essais atomiques
soviétiques) étaient top-secret, pas (en 1947) les
équipements utilisés (qui étaient standards). Ces
cibles radar étaient elles si extraordinaires, inconnues et
non-reconnaissables par les témoins ? Etaient-elles
marquées ou pas et si oui comment ?
La crédibilité objective des témoins
principaux de
la thèse MOGUL, à commencer par Charles B Moore, sur la
mémoire duquel repose quasi-entièrement la thèse
officielle. En fouillant un peu, des questions se posent. Mais je
questionnerai aussi le témoignage de Sheridan Cavitt ou du
Colonel Trakowsky par exemple.
Inversement des témoignages crédibles et tangibles
(affidavits, vidéos) sont minimisés voire ignorés
par la thèse officielle. En particulier celui du colonel Dubose,
mais aussi ceux de W. Haut, F. Joyce ou L. Rickett. J'investiguerai
cela aussi.
Le vol N°4 censé avoir provoqué les
débris
à l'origine de l'affaire : quand a-t-il été
lancé, de quoi était-il composé exactement, quel
était son but ? Là encore, en creusant un peu, tout n'est
pas clair, loin de là.
Le fameux scotch à fleurs, le "smoking gun" de la
thèse
officielle. Il n'y a aucune preuve tangible qu'il ait été
employé à l'époque (sinon ce serait dans le
rapport USAF), qu'en est-il alors de son usage en 1947 ? Comment ses
motifs se sont-il imprimés sur les baguettes de balsa ? Qui
était le fabricant de jouet ayant fabriqué ces cibles et
utilisé ce scotch ?
Un cover-up militaire a-t-il pu réellement se mettre en
place
à l'époque, en quelques heures à peine, avec
échange des débris lors de la conférence de presse
à Fort Worth et pressions sur le témoin principal,
William Mac Brazel ? S'agissait-il d'une simple protection du projet
MOGUL ? Si oui pourquoi l'USAF ne le sait-elle toujours pas en 1994,
pourquoi aucune trace dans les documents et pourquoi Trakowsky le
nie-t-il ?